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The Salesman's Tale - Le conte du vendeur (de OniryM)

Une traduction de OniryM (sur http://onirym.online.fr/) de The Salesman's Tale.

Heureusement que j'ai projeté de laisser Merlin dans la caverne de cristal pour un bon moment. Heureusement qu'il n'y est pas resté jusqu'au bout.
Lorsque j'interrompis notre conversation par atout, en donnant un coup de pied dans mon verre de thé et en criant : " Merde, je l'ai renversé ...", je retournais l'atout de la vengeance dans ma bonne main.
La forêt décharge. Une belle esquisse. Cependant ce qu'elle représentait n'avait aucun intérêt pour moi, c'est pourquoi j'ai demandé à Merlin de disposer les cartes en éventail, faces vers le bas et que j'en ai tiré une au hasard. C'était pour le spectacle, pour dérouter la Marelle. Elles mènent toutes en des lieux proches de la caverne de cristal ; ce qui était la vraie raison de leur existence, en premier lieu. Leur seul but était de mener Merlin dans un rayon proche de la caverne, à cet endroit un système d'alarme basé sur les Tragolithes devait me prévenir. Mon plan était de m'y dépêcher et de trouver un moyen de l'emprisonner. Malheureusement, je n'ai pas reçu le message quand il a rejoint le Sphinx, pour échapper à maman. Ses neurotoxines ont bloqué un signal de déclenchement nécessaire, provenant de son système nerveux, juste une de ses nombreuses façons qu'elle a pour embrouiller mes plans sans même se fatiguer. Ca n'a pas d'importance après tout. J'ai eu Merlin là-bas, de toute façon. Seulement tout a changé après ça ...
" Luke ! Imbécile ! " Le message de la Marelle me souffla comme le bouquet final d'un concert de rock.
Mais la forêt décharge était déjà devenue nette et je passais à travers l'atout, avant que la Marelle ne réalise que c'était du thé et non mon sang qui lui coulait dessus.
Je me relevais quand la Marelle s'évanouit, et je m'avançais parmi les buissons de lames de scies rouillées, les arbres de poutres tordues, les lits de verre brisé joliment colorés. Je me mis à courir, du sang coulait de la paume de ma main droite tailladée. Je ne pris même pas le temps de la bander. Dès que la Marelle se sera remise du choc et découvert qu'elle était indemne, elle commencera à fouiller les ombres à ma recherche, à celle des autres. Ils doivent être en sécurité sous l'influence de l'autre Marelle, il ne reste plus que moi. Les murs de la caverne de cristal ont pour effet de bloquer tous les phénomènes paraphysiques que j'ai été capable de tester dessus, et je supposais qu'ils me protégeraient aussi bien de l'exploration de la Marelle. Le seul problème était mon arrivée là-bas avant qu'elle n'ait feuilleté les ombres aussi loin.
J'augmentais mon rythme. J'étais resté en forme. Je pouvais courir. A côté d'épaves de voitures, des tourbillons de ressorts de lits, de tuiles cassées, d'emballages déchirés... Descendant des allées de cendres, remontant des pistes de capsules de bouteilles de d'étiquettes... En alerte, attendant. Attendant que le monde tourne et vire, entendre la voix de la Marelle annoncer, " Je t'ai eu ! "
Je pris un coude et aperçu un peu de bleu au loin. La forêt décharge s'arrêta brusquement quand j'entrais sur une pente en contrebas, pour être remplacée au fur et à mesure par un bois de variété plus normale.
Là, j'entendis quelques chants d'oiseaux quand je passais, et le bourdonnement d'insectes, par-dessus le martèlement régulier de mes pieds sur le sol. Le ciel était couvert, et je ne pouvais rien dire de la température ou du vent à cause de mon activité. La butte bleutée s'élargit. Je maintins mon rythme. A présent les autres doivent être saufs, s'ils ont jamais dû l'être. Par les enfers ! A présent ils doivent largement être hors de danger. Juste un moment dans ce courant temporel était beaucoup plus long dans les voies principales. Ils pourraient être assis autour d'une table et plaisanter en ce moment. Ou même faire un somme. Je ravalais une malédiction pour garder mon souffle. Cela voulait aussi dire que la Marelle pouvait être en train de chercher depuis bien plus longtemps qu'il ne semblait...
Plus large, bien plus large maintenant la crête bleue. Je décidais de voir si mon sprint final était toujours aussi bon, et je passais en grande vitesse et la maintins.
La terre et l'air furent secoués par ce qui sembla être un roulement de tonnerre. Cela pouvait être une réaction du motif courroucé m'ayant finalement retrouvé. Cela pouvait aussi être juste un roulement de tonnerre.
Je continuais à haleter, et quelques instants plus tard, à ce qu'il sembla, je freinais juste à temps pour ne pas m'écraser contre les fondations de cristal. Pas encore de boules de feu, et je grimpais à l'aide des mains et de la pointe des pieds. Je n'avais encore jamais essayé d'escalader cette paroi auparavant. Mes poumons marchaient comme un soufflet, et une pluie fine commença à tomber, se mêlant avec ma transpiration. Je laissais quelques taches de sang sur la pierre, mais cela ne devais pas tarder à partir.
Arrivant au sommet, je me précipitais à quatre pattes vers son ouverture et j'entrais les pieds en premier, me suspendit puis je tombais dans l'obscurité, en dépit de la présence d'une échelle. Je n'avais qu'une hâte. Jusqu'à ce que je me retrouve dans cette ambiance bleutée, je ne me sentais pas en sécurité. Dès l'instant où j'ai repris mon souffle je me permis de rire. Je l'ai fait. J'ai échappé à la Marelle.
Je marchais jusqu'à la chambre en me tapant sur les cuisses et en frappant les murs. Une victoire comme celle-ci avait bon goût, et je ne pouvais pas ne pas la marquer. Je me dépêchais vers le garde-manger, trouvais une bouteille de vin, l'ouvris et en bus une gorgée. Puis je me rendis à une cave latérale qui contenait encore un sac de couchage, je m'assis dessus, et je continuais de pouffer en me remémorant notre expérience à la Marelle Primale. Ma Lady Nayda a été si magnifique. Merlin aussi pour sa part. Maintenant ...
Je me demandais si la Marelle gardait vraiment rancune. C'est-à-dire, dans combien de temps serait-il possible que je sorte sans que je sente un péril imminent sur mes épaules ?
Impossible à dire ; malheureusement. Cependant, la Marelle a beaucoup trop de choses à faire pour réagir d'une quelconque manière comme ces gens qui rôdent à ses environs ; c'est-à-dire, les Ambriens. N'est-ce pas ? Je bus une autre gorgée. Il semble que je dois rester ici un bon moment.
Je décidais que je devrais utiliser un sortilège pour modifier mon apparence. Quand je partirais d'ici je devrais avoir des cheveux bruns et une barbe, par-dessus les prémisses d'une vraie barbe, les yeux gris, un nez droit, les pommettes plus hautes, et un menton plus petit. Je devrais paraître plus grand et beaucoup plus maigre. Je devrais remplacer mes habituels vêtements brillants par des plus sombres. Par seulement un peu de lumière, ni même un sort purement cosmétique. Cela devra en être un puissant avec de la profondeur et de la substance.
Méditant là-dessus, je me levais et partis en quête de nourriture. Je trouvais un peu de boeuf en conserve et des biscuits, et j'utilisais un petit sortilège pour réchauffer une boite de soupe. Non ce n'était pas une violation des lois physiques du lieu. Les murs de cristal bloquent les allées et venues de magie. Mais mes sortilèges sont venus avec moi et opèrent normalement à l'intérieur.
En mangeant, je repensais encore à Nayda, à Merlin, et à Corail. Quoiqu'il ait pu leur arriver, bien ou mal, le temps a favorisé tout ce qui devait se passer. Même si je ne reste ici qu'un court moment, les événements passés à la maison seront sans commune mesure avec le laps de temps apparemment écoulé ici. Et quelle sorte de temps est considéré par la Marelle ? Tous sûrement, c'est-à-dire le sien, mais je pensais aussi qu'elle se calquait spécialement sur son écoulement général en Ambre. En fait j'en étais presque sûr, puisque c'est là-bas que se situe l'action. Donc si je veux revenir dans la course rapidement, je dois rester ici juste le temps nécessaire pour permettre à ma main de guérir.
Mais réellement, quel mal pouvait bien me vouloir la Marelle ? A quel point je devais vraiment m'en inquiéter ? Qu'est-ce que j'étais pour elle ? Roi d'un royaume mineur du Cercle d'Or. Assassin d'un prince d'Ambre. Fils de l'homme qui a pensé à la détruire ... J'en tressailli, mais je réfléchis que la Marelle m'avait laissé vivre ma vie jusqu'à présent sans représailles pour les actes de père. Et ma part dans les affaires courantes a été minime. Corail a semblé principalement concernée, de même que Merlin. Peut-être que je suis trop prudent. Vraisemblablement, elle m'a banni de ses considérations au moment où j'ai déguerpi. Néanmoins je n'étais pas près de sortir d'ici sans ce déguisement.
Je finis de manger et sirotais le vin. Et quand je serais sorti ? Qu'est-ce que je ferais exactement ? De nombreuses solutions assaillirent mon esprit. Je commençais aussi à bâiller et le sac de couchage avait vraiment l'air bien. Des éclairs flachèrent, vagues bleues à travers les murs. Puis le tonnerre vint, comme le ressac. Demain, oui. Demain je déciderais ...
Je me glissais à l'intérieur, et m'installais confortablement. En un instant, j'étais parti.
Je n'ai aucune idée du temps que j'ai passé à dormir. Au réveil, je fis des rondes pour établir un sentiment de sécurité, passais très vite sur mes vigoureux exercices routiniers, me lavais, puis je mangeais mon petit déjeuner sans me hâter. Je me sentais mieux que la veille, et ma main avait déjà commencé à guérir.
Puis je m'assis et regardais fixement le mur, probablement pendant des heures. Quelle était la meilleure façon d'agir ?
Je pourrais me précipiter vers Kashfa et la royauté, ou courir après mes amis, je pouvais aussi entrer en clandestinité, me tapir, et enquêter jusqu'à ce que j'apprenne ce qui se tramait. C'était une question de priorités. Quelle était la chose la plus importante que je pouvais faire pour toutes les personnes concernées ? J'y pensais jusqu'à l'heure du déjeuner, puis je mangeais encore.
Après ça, je pris mon petit nécessaire à dessin et un crayon, et je me mis à me rappeler une certaine dame, trait pour trait. Je m'escrimais avec tout l'après midi, pour passer le temps, même si je savais que je l'avais bien. Quand je m'arrêtais pour le dîner, les activités du lendemain avaient déjà pris forme dans ma tête.
Le lendemain matin, ma blessure avait considérablement diminué, et je me conjurais un miroir sur une surface lisse du mur. Utilisant une lampe pour ne pas gaspiller un sort d'illumination, je créais cette silhouette grande sombre et maigre par-dessus la mienne, puis j'enchantais ces traits aquilins sur les miens, complétés d'une barbe, alors j'examinais mon travail et vis que c'était bien. Je transformais aussi l'apparence de mes vêtements, pour me mettre dans l'ambiance, ce qui ne nécessitais qu'un sort simple. Je devrais m'en trouver des vrais le plus tôt possible. Il n'y avait aucun intérêt à gaspiller un puissant sortilège pour quelque chose d'aussi trivial. Je fis toutes ces choses car je voulais garder le déguisement toute la journée, m'en imprégner, voir s'il y avait des défauts dans mon travail. Je voulais dormir dedans pour la même raison.
Cet après-midi là, je repris mon carnet à dessin. J'étudiais mon travail de la veille, puis je pris une feuille blanche et exécutais un atout. Ca avait l'air bien.
Le matin suivant, après la routine habituelle, je me réexaminais dans le miroir, fus satisfait, et j'escaladais l'échelle pour émerger de la caverne. C'était un matin humide et froid avec quelques trous bleus dans le ciel surchargé. Il pouvait encore pleuvoir. Mais que diable en avais-je à faire ? J'étais sur le chemin du départ.
Je sortis mon carnet puis fis une pause. Je repensais aux autres atouts auxquels j'ai eu affaire pendant toutes ces années, et à autre chose. Je sortis mon paquet d'atouts. Les sortants, je les passais doucement en revue jusqu'à ce que j'arrive sur le plus triste, celui de mon père. J'ai gardé sa carte pour une affaire de sentiment, aucune utilité. Il était exactement comme je me le rappelais mais je ne l'avais pas sortie pour les souvenirs. C'était à cause de l'objet qu'il portait à son côté.
Je me concentrais sur Werwindle, d'après tous les on-dit une arme magique, d'une certaine façon liée à la Grayswandir de Corwin. Et je me souvins que Merlin m'avait raconté comment son père avait invoqué Grayswandir en ombre, après son évasion des cachots d'Ambre. Il y avait une affinité spéciale entre lui et cette arme. En tout cas, je le supposais. Maintenant que les choses se sont accélérées et que de nouvelles aventures se préparent, il serait peut être préférable d'affronter les choses avec le métal approprié. Bien que père soit mort, Werewindle était d'une certaine façon vivante. Bien que je ne puisse pas joindre mon père, je pouvais d'une quelconque façon joindre son épée, où qu'elle soit, et selon les dernières informations, quelque part aux Cours du Chaos.
Je fixais mon attention sur elle, l'appelant de l'esprit. Je crus sentir quelque chose, et quand je le touchais, le point qu'elle occupait sur la carte sembla se refroidir. J'avançais. Plus loin. Plus fort.
Alors il y eut de la clarté et de la proximité et le sentiment qu'une intelligence froide et étrangère me regardais.
" Werewindle ", dis-je doucement.
S'il peut y avoir l'écho d'un son qui n'eut jamais eu lieu, c'est ce que j'entendis.
" Fils de Brand , vint comme une vibration.
- Appels moi Luke."
Il y eut un silence. Puis " Luke ", répondit l'écho.
Je me tendis, l'attrapais, et la ramenais vers moi. Le fourreau vint avec. Je me retirais.
Je la tenais dans mes mains maintenant, je la sortais de son fourreau. Il y avait comme de l'or en fusion qui flottait autour du dessin qu'elle portait. Je la levais, l'étendis, exécutais une passe. Elle semblait bien. Elle semblait parfaite. C'était comme si un énorme pouvoir se cachait derrière chacun de ses mouvements.

" Merci ", dis-je. Et l'écho d'un rire passa.
Je pris mon carnet et l'ouvris à la bonne page, espérant que se fut le bon moment pour l'appeler. Je regardais les traits délicats de la dame, son regard vague qui indiquait d'une certaine façon la largeur et la profondeur de sa vision. Après quelques instants, la page se refroidit entre mes doigts, et mon dessin acquis une qualité tridimensionnelle, commença à bouger faiblement.
" Oui ? Me parvint sa voix.
- Votre altesse, quelque soit la manière dont vous percevez ces choses, je veux que vous sachiez que j'ai intentionnellement modifié mon apparence. J'espérais que ...
- Luke, dit-elle, bien sûr que je vous ai reconnu, vous êtes votre propre maître maintenant. Son regard était toujours vague. Vous êtes troublés.
- En effet.
- Vous voulez passer ?
- Si c'est convenable et approprié.
- Certainement."
Elle tendit sa main. Je m'avançais, la prenant délicatement dans la mienne, son studio devint clair, bannissant les nuages gris et la colline de cristal. Je fis un pas vers elle, et j'y étais.
Immédiatement, je me mis à genoux, détachais mon ceinturon et lui offrit mon épée. Au loin je pouvais entendre des bruits de marteau et de scie.
" Levez-vous, dit-elle en touchant mon épaule. Venez et asseyez-vous. Vous prendrez bien une tasse de thé avec moi.
Je me relevais et la suivis jusqu'à une table dans le coin. Elle ôta son tablier sale et le suspendit à un crochet sur le mur. Pendant qu'elle préparait le thé, je regardais la petite armée de statues qui longeait un mur et bivouaquait au hasard dans l'énorme salle ; grandes, petites; réalistes, impressionnistes, belles, grotesques. Elle travaillait principalement en argile, même si quelques-unes des plus petites étaient en pierre ; et il y avait des fours au fond de la salle, mais ils étaient froids en ce moment. Quelques mobiles métalliques de forme inhabituelle étaient suspendus aux poutres du plafond.
Quand elle me rejoint, elle toucha ma main droite où se trouvait l'anneau qu'elle m'avait donné.
" Oui, j'apprécie la protection de la reine, dis-je.
- Même si vous êtes monarque vous -aussi, et d'un royaume en bons termes avec nous ?
- Même, dis-je, tant en fait, que je voudrais vous rendre la pareille, en partie.
- Oh ?
- Je ne suis pas certain qu'Ambre soit au courant de certains événements récents auxquels j'ai pris part ou dont j'ai eu connaissance, et qui peuvent affecter sa sécurité. En tout cas, ceci est valable si Merlin n'a pas donné de ses nouvelles récemment.
- Nous n'avons pas vu Merlin, dit-elle. Si vous avez des informations vitales pour le royaume, cependant, vous devriez peut-être les donner directement à Random. Il n'est pas là en ce moment, mais je peux le joindre par atout.
- Non, dis-je. Je sais qu'il ne m'aime pas du tout, et ne me fait pas confiance, en tant qu'assassin de son frère et ami de l'homme qui a voulu détruire Ambre. Je suis sûr qu'il aimerait me voir déposé et mettre un pantin sur le trône de Kashfa. Je suppose que je devrais mettre les choses au point avec lui, un jour, mais ce n'est pas aujourd'hui. J'ai trop de choses à faire en ce moment. Mais les informations dépassent la politique locale. Cela implique Ambre et les Cours du Chaos, la Marelle et le Logrus, la mort de Swaywill et la possible accession de Merlin sur le trône des Cours du Chaos.
- Vous êtes sérieux !
- Vous voulez parier ? Je sais qu'il vous écoutera et qu'il comprendra pourquoi je vous ai parlé à vous. Laissez-moi l'éviter de cette façon. Il y a de grands événements en perspective.
- Racontez-moi, dit-elle en levant sa tasse. "
Ce que je fis, incluant tout ce que Merlin m'avait raconté, jusqu'à la confrontation à la Marelle Primale, et mon voyage vers la caverne de cristal. La théière y passa entièrement, et quand j'eus fini, nous restâmes assis en silence.
Finalement elle soupira.
" Vous m'avez chargée de délivrer un renseignement majeur, dit-elle.
- Je sais.
- Pourtant je pense qu'il s'agit juste d'une partie d'événements bien plus importants.
- Comment çà ? Demandais-je.
- Quelques petites choses que j'ai entendues, connues, devinées et peut être rêvées, et d'autres que simplement je crains. Suffisamment, peut-être pour requérir aux pouvoirs de la terre avec laquelle je travaille. Oui. Maintenant que j'y pense, je dois l'essayer, bien sûr. A un moment comme celui-ci.
Elle se leva doucement, s'arrêta, et fit de grands gestes.
- Ceci devra être la Langue ", dit-elle, et un mouvement agita un des mobiles, lui faisant produire différents sons.
Elle traversa le studio vers le mur de droite, petite silhouette grise et verte, ses cheveux châtains descendants jusqu'au milieu du dos. Elle fit courir ses doigts, délicatement, sur la figurine sculptée qui se trouvait là. Finalement, choisissant une statue à la grosse tête et au torse étroit, elle commença à la pousser vers le milieu de la pièce.
Je me levais en un instant.
" Laissez moi le faire à votre place, altesse."
Elle secoua la tête.
" Appelez-moi Vialle, dit-elle. Et non, je dois les placer moi-même. Celle ci se nomme Mémoire."
Elle la positionna sous et un peu au nord-ouest de la Langue. Puis elle alla vers un groupe de statues, et en sélectionna une mince aux lèvres fines qu'elle plaça au sud de la Langue.
" ... Et celle-ci est désir ", déclara-t-elle.
Rapidement, elle en localisa une troisième, une grande qui louchait, qu'elle plaça au nord-est.
" Prudence " poursuivit-elle.
Une femme, la main droite audacieusement levée vint à l'ouest.
" Risque ", continua-t-elle.
A l'est elle plaça une autre femme, les bras levés.
" Coeur ", dit-elle.
Au sud-ouest vint un philosophe au front haut et aux sourcils broussailleux.
" Tête ", dit-elle.
... Et au sud-est une femme souriante, impossible de dire si sa main était levée pour saluer ou pour frapper.
" Chance" finit-elle en l'ajustant dans le cercle qui commençait à me rappeler à la fois Stonehenge et l'île de Pâques.
" Apportez deux chaises, dit-elle. Et mettez les là et là ".
Elle indiqua des points au nord et au sud du cercle.
Je fis comme elle demandait, et elle s'assit sur la chaise la plus au nord, derrière la dernière statue qu'elle a placée, Prévoyance. Je pris place derrière Désir.
" Silence maintenant ", m'ordonna-t-elle.
Puis elle resta assise, les mains sur les genoux, pendant quelques minutes. Finalement,
" Au niveau le plus profond, dit-elle, qu'est ce qui menace la paix ? "
A ma droite, Prudence sembla parler, mais c'était la Langue qui prononça ses mots au-dessus de ma tête.
" Une redistribution d'anciens pouvoirs, dit-il.
- De quelle manière ?
- Ce qui est caché se révèle et approche, répondit risque.
- Ambre et les Cours sont-elles toutes deux impliquées ?
- En effet répondit Désir devant moi.
- D'anciens pouvoirs, dit-elle, ancien jusqu'à quel point ?
- Avant qu'il y ait une Ambre, ils existaient; déclara Mémoire.
- Avant le Joyau du Jugement, l'Oeil du Serpent ?
- Non répondit Mémoire.
Elle prit une brusque inspiration.
- Leur nombre ? dit-elle.
- Onze, répliqua Mémoire.
Elle pâlit à cette réponse, mais je gardais le silence comme elle me l'avait demandé.
- Les responsables de ce soulèvement de cendres, dit-elle alors, que veulent-ils ?
- Le retour à la gloire d'un temps révolu, déclara Désir.
- Cette fin peut-elle se réaliser ?
- Oui, dit Prévoyance.
- Peut-elle être écartée ?
- Oui, répondit Prévoyance.
- C'est périlleux, ajouta Prudence.
- Comment doit-on commencer ?
- Cherchez les gardiens, déclara Tête.
- A quel point la situation est-elle mauvaise ?
- Cela a déjà commencé, répondit Tête.
- Et le danger est déjà présent, dit Risque.
-De même que la chance à saisir, dit Chance.
- De quelle sorte ? S'enquit Vialle.
Un son parvint de l'autre côté de la pièce, au moment où mon épée et son fourreau glissèrent du mur où je les avaient posés. Vialle ouvrit de grands yeux.
- Mon arme, dis-je, elle a juste glissé.
- Nommez-la.
- C'était l'épée de mon père, Werewindle.
- J'en ai entendu parler. Cet homme, Luke, dit-elle alors, il y a quelque chose à propos de son épée, et de sa soeur qui joue un rôle dans tout ça. Bien que je ne connaisse pas leur histoire.
- Oui, elles sont liées dit Mémoire.
- De quelle façon ?
- Elles ont été créées de façon similaire, et presque au même moment, et elles sont de même nature que les pouvoirs dont nous avons parlé, répondit Mémoire.
- Y aura-t-il conflit ?
- Oui, dit Prévoyance.
- A quelle échelle ?
Prévoyance resta silencieuse, Chance rit.
- Je ne comprends pas.
- Le rire de Chance est l'incertitude, répondit Tête.
- Luke figure-t-il dans ce conflit ?
- Oui, répondit Prévoyance.
- Doit-il chercher les gardiens ?
- Il doit essayer, dit Coeur.
- Et s'il échoue ?
- Un prince approche en ce moment, qui en sait plus sur le sujet, dit Tête.
- Qui est-ce ?
- Il arbore une rose en argent, dit Tête, il porte l'autre épée.
Vialle leva la tête.
- Avez vous des questions ? Me demanda-t-elle.
- Oui, mais je doute qu'on reçoive une réponse si je demande si on va gagner."
Chance rit quand Vialle répéta.
Elle me laissa l'aider à remettre les statues à leur place. Puis une fois que l'on se fut assis de nouveau, je lui demandais :
" Chercher les gardiens ?
- Il y a un conservateur, peut-être deux. Un prince qui s'est exilé et sa soeur ont gardé une partie de ces pouvoirs pendant un long moment. Il semblerait opportun de voir s'ils sont toujours vivants et s'ils s'acquittent encore de cette tache.
- Exilé, pourquoi ?
- Raisons personnelles, impliquant l'ancien roi.
- Où sont-ils ?
- Je ne sais pas.
- Alors comment puis-je les trouver ?
- Il existe un atout. "
Elle se leva et se dirigea vers une petite commode. Ouvrant un tiroir, elle sortit un jeu d'atouts dans son étui. Doucement, elle les compta à partir du dessus du paquet et en retira une.
Quand elle revint, elle me présenta la carte, portrait d'un homme mince aux cheveux couleur de rouille.
" Son nom est Delwin, me dit-elle.
- Vous pensez que je dois juste l'appeler et lui demander s'il a toujours ce qu'il avait ?
- Annoncez rapidement que vous n'êtes pas d'Ambre, m'indiqua-t-elle, mais donnez votre parenté. Demandez-lui si son intendance des aiguillers reste intacte. Essayez de savoir où il se trouve, ou de traverser pour en discuter en tête à tête, si vous pouvez.
- D'accord ", dis-je, je ne voulais pas lui raconter que j'avais déjà parlé avec lui, très brièvement, en cherchant des alliés dans ma guerre contre Ambre. Il ne m'avait pas laissé finir, mais je ne voulais pas raviver les souvenirs de Vialle. Alors je dis simplement :
" Ok, je vais faire un essai. "
Je décidais d'une discussion brève tout d'abord, pour lui laisser le temps de réfléchir, de réaliser que je n'étais pas seul, et ne rien laisser passer de notre précédent entretient. Mon déguisement pouvait aider en cela aussi.
Je me tendis vers le contact.
D'abord le froid, puis la sensation d'une personne soudain en alerte.
" Qui est-ce ? Je sentis la question avant même que le portrait ne prenne de la vie et de la profondeur.
- Luke Reynard, aussi connu sous le nom de Rinaldo, répondis-je quand la carte fut soudain animée, et que je sentis son regard inquisiteur, roi de Kashfa et diplômé de management à Berkeley, université de Californie. Nos regards se croisèrent. Il ne semblait ni belliqueux ni amical. Je voulais savoir si votre intendance des aiguillers est restée intacte.
- Luke Rinaldo, dit-il, en quoi cela vous concerne-t-il, et comment en êtes vous venu à être au courant de ça ?
- Bien que je ne sois pas d'Ambre, répliquais-je, mon père l'était. Je sais que d'ici peu ce sera un sujet de préoccupation, grâce à Merlin, fils de Corwin, apparemment descendant en droite ligne du trône des Cours du Chaos.
- Je sais qui est Merlin, dit Delwin blasé. Qui est votre père ?
- Le prince Brand.
- Et votre mère ?
- Lady Jasra, anciennement reine de Kashfa. Maintenant pouvons-nous parler de ce sujet un instant ?
- Non, dit Delwin, nous ne pouvons pas.
Il bougea sa main comme pour couper le contact.
- Attendez ! Dis-je. Avez-vous un four à micro-ondes ?
Il hésita.
- Un quoi ?
- C'est un dispositif en forme de boite qui peut chauffer un plat en quelques minutes. seulement J'ai élaboré un sortilège qui permet d'en faire fonctionner un dans la plupart des ombres. Vous vous réveillez au milieu de la nuit avec une envie de ragoût bouillant ? Sortez-en une boite du réfrigérateur, ouvrez-la et fourrez-la dans le four. Mais qu'est-ce qu'un réfrigérateur ? Bonne question. C'est une autre boite avec un hiver permanent à l'intérieur. Stockez les aliments dedans, sortez-en et mettez-les dans le micro-ondes quand l'envie vous en prend. Et oui, je peux fournir le réfrigérateur aussi. Vous ne voulez pas parler des aiguillers, parlons affaires. Je peux vous proposer un marché sur ces appareils, en quantité, qui concurrencera ou battra le prix de tout autre fournisseur, et je doute que ce soit une chose facile que d'en trouver un autre. Et ce n'est pas tout ce que je peux faire pour vous.
- Je suis désolé, dit-il, je ne reçois pas les représentants.
Sa main bougea de nouveau.
- Attendez ! Criais-je, je vais vous faire une offre que vous ne pourrez pas refuser !
Il coupa la communication.
- Revenez ", je maintenais une concentration sur son image, mais elle redevint bidimensionnelle et se réchauffa. " Désolé, dis-je à Vialle. J'ai fait de mon mieux, mais il n'a rien acheté.
- A dire vrai, je ne pensais pas que vous le tiendriez aussi longtemps. Mais je peux vous dire qu'il était intéressé jusqu'à ce que vous mentionniez votre mère. Quelque chose a changé alors.
- Si c'était la première fois, dis-je. J'ai envie de le rappeler plus tard.
- Dans ce cas, gardez l'atout.
- Je n'en ai pas besoin, Vialle. Je créerais le mien en temps voulu.
- Vous êtes un artiste et un maître des Atouts ?
- Et bien, il m'arrive de peindre. Assez sérieusement parfois.
- Alors vous devez voir toutes mes oeuvres pendant que vous attendrez, je voudrais avoir votre opinion.
- Avec plaisir, dis-je. Vous disiez pendant que j'attendrais ...
- ... Corwin.
- Ah ! Très bien.
- Comme ça vous pourrez être le premier à utiliser une des nouvelles chambres. Nous avons fait pas mal de reconstructions et de modifications, depuis la confrontation de la Marelle avec le Logrus.
- J'en ai entendu parler, dis-je. Bien, je me demande quand va-t-il arriver ?
- Bientôt je le sens, répondit-elle. Je vais appeler un serviteur pour que vous vous installiez maintenant. Un autre viendra vous chercher pour dîner avec moi, nous pourrons discuter art.
- Ce sera parfait. "
Je me demandais où tout cela allait nous mener. Il semblait que tout était en train de se bouleverser, encore.
Heureusement que Delwin n'ait pas été intéressé par le four à micro-ondes. Le sort aurait été foutrement difficile à mettre en place.

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