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Journal d'Alchibald Baldwin

Par Joel Diligeart ©1995, V1.1 du 04/01/1996

Chapitre 1: Une soirée comme les autres

Ce soir là, nous étions confortablement installés dans notre salon privé du club des Quatre Vents pour passer une agréable soirée comme tant d'autres. Par nous, il faut entendre les membres fondateurs de ce club ésotérique, très prisé au sein de la jet society londonienne, dans lequel nous sommes naturellement les quatre vents. Marcus Von Blücher, le vent du sud, charmant bambin de près de deux mètres et plus de cent kilos d'os et de muscles dont le jeu préféré consiste à consciencieusement broyer ses adversaires, et occasionnellement ses amis, et qui a obtenu en contrepartie le titre incontesté de champion du monde de lutte toutes catégories. Derek O'Sullivan, le vent du nord, l'artiste aux croquis plus vrais que nature d'autant plus qu'il arrive que la nature se conforme à ses esquisses, au lieu du contraire qui est plus usuel. Allistair Mac Donald, le vent d'est, initiateur de notre cercle, artiste de cirque, grand ami des animaux et certainement le plus mystique d'entre nous. Et pour terminer, votre serviteur, Archibald Baldwin, le vent d'ouest, grand ferrailleur devant l'Eternel qui pouvait encore s'enorgueillir de ses trois titres olympiques et se considérer comme le meilleur escrimeur de sa génération.
La réunion de quatre personnes aussi disparates peut, au prime abord, paraître curieux mais de réelles affinités nous liaient. Outre le fait que nous avions tous eu des expériences ésotériques et continuions à oeuvrer dans ce sens, nous étions également devenus orphelins entre notre dixième et quinzième anniversaire. La mort de nos parents, dans des accidents qui jusqu'alors ne nous avaient pas parus relever de coïncidences étranges, voire même suspectes, nous avaient laissés, riches héritiers, une vie de dilettantes mondains particulièrement actifs.
Nous étions donc confortablement installés autour d'une table ronde, dissertant sur les événements de notre journée, non sans avoir demandé des rafraîchissements à Georges, notre majordome. Il apparu que nous avions tous les quatre vécu une expérience étrange et similaire au cours de la journée. Marcus, Derek et moi-même avions été brutalement tirés en avant par une force invisible en une seule occasion alors qu'Allistair s'était senti mû, en continu mais de manière moins soudaine, par cette même force. Nous cherchions des explications à ce phénomène quand une jeune femme, tout de bleu vêtue, se matérialisa debout sur notre table au moment où Georges revenait avec les susmentionnés rafraîchissements qui allèrent abreuver le tapis. Allistair eu juste le temps de tendre les bras pour accueillir le corps charmant mais inconscient de notre étrange invitée.
A peine avions nous allongé la jeune femme sur le sofa et constaté que ses habits, pour seyant qu'ils soient, étaient plus en adéquation avec le Moyen-Age qu'avec notre époque que Georges revînt pour nous informer qu'un étranger demandait à nous rencontrer. Allistair descendit s'enquérir de cette arrivée, pour le moins inopportune. A la porte, Allistair se trouva face à force avec un homme barbu, mais surtout à la carrure impressionnante, qui lui déclara immédiatement "Je crois que vous avez quelque chose qui m'appartient" en le saisissant par le cou et le plaquant contre le mur. Allistair jugeant sa position d'autant plus inconfortable que ses pieds ne touchaient plus terre, préféra simuler l'évanouissement à la suite de quelques éructations destinées à clairement traduire la désagréable compression de sa trachée alors que l'homme émettait un "Où est-elle ?" particulièrement insistant et convainquant. Ce que voyant, ce gentleman le lâcha en marmonnant un "Loque", qui se voulait méprisant mais qui glissa sur la pseudo inconscience d'Allistair.
Pendant cette conviviale entrevue, nous avions portée l'inconnue sur le lit d'une chambre attenante et tenté, en vain, de la réanimer. En déboutonnant son col pour la mettre à l'aise, je découvris une pierre rouge et étrange qui me sembla familière. Je ne pus résister à l'envie de la posséder et elle finit, avec la chaîne qui l'accompagnait, dans la poche gauche de mon costume. Derek, quant à lui, dessinait la "Dame en bleu" en train de se réveiller, esquisse qui ne fut pas couronnée de succès à son grand désappointement. C'est alors que notre barbu, préférant défoncer la porte plutôt que de l'ouvrir selon les usages communs, s'encadra dans son chambranle.
Marcus se rua sur l'homme tête baissée, lui percutant l'estomac et le propulsant contre le mur opposé qui protesta de manière véhémente envers une telle attaque dirigée à l'encontre de son intégrité structurelle. A la suite de cette brutale prise de connaissance, les deux protagonistes s'attachèrent à s'étrangler de concert. Derek commença un dessiner un combat dans lequel Marcus prenait le dessus, mais à nouveau sans effet, au grand étonnement de Derek. Quant à moi, je me précipitai vers une pièce voisine dans laquelle étaient suspendues des épées. Au moment où je me saisissai d'une rapière, le mur devant moi explosa, laissant passer deux golems à la peau métallique et un humain totalement environné de flammes, qui ne semblait pas s'en porter plus mal. Je me reculai précipitamment, évitant les golems. Le chalumeau vivant prononça alors un mot étrange qui précéda de peu ma chute due à la présence inopportune d'un chandelier absent du lieu quelques instants auparavant. Je n'eus que le temps de me relever et me ruai entre les deux golems, plantant ma rapière entre les deux yeux de l'homme igné. Las, ma rapière fondit instantanément et, profitant de ma surprise, l'un des golems me saisit dans ses bras d'acier glacé. L'être de feu plongea alors sa main au travers de la poche de mon costume et se saisit du joyau couleur de rubis. Le feu compensant le froid, je ne fut pas trop incommodé mais fort marri et inquiet.
Sur ces entrefaites, arrivèrent les deux videurs du club, appelés par Allistair, qui firent feu sur les golems. Ces derniers se retournèrent alors que quelques écailles de leur peau cuirassée avaient sautées sous les impacts des balles, et se jetèrent sur mes courageux défenseurs. Paix à leurs âmes. A cet instant, un nouveau mur explosa, laissant le passage à un homme vêtu d'une armure laquée blanc qui, d'un revers de son épée à deux mains, trancha net le bras du maître des golems et récupéra le très convoité joyau. Je réussi ainsi à me dégager et me dirigeai vers un râtelier d'armes, duquel j'otai une épée à deux mains, pendant que mon sauveur affrontait les deux golems et que le chalumeau vivant tenait son moignon en gémissant.
Pendant cet intermède, somme toute très banal dans un club anglais, Allistair était revenu dans la chambre, avait chargé la Dame en bleu sur son épaule et emprunté un escalier donnant vers une sortie latérale et envisagée comme salvatrice. Il se heurta alors à un mur invisible et aperçu, au delà, une charmante jeune femme à laquelle il demanda "Mais qui donc êtes-vous ?". Il obtint comme seule réponse "Fils du Chaos, l'ignorance est ton lot" avant de sombrer dans une inconscience, non simulée cette fois. Marcus, quant à lui, avait pris la mesure de son adversaire qui, s'il était plus vicieux dans ses attaques, n'avait pas la force et la volonté massive de notre jovial ami. Alors que la victoire était à sa portée, la bague de son adversaire, qui n'était pas sans similitudes avec le joyau tant convoité, se mit à briller et la terre trembla, ce qui eut pour conséquence de séparer les deux lutteurs. L'homme porta alors la main derrière son épaule et la ramena devant lui, accompagnée d'une énorme épée à deux mains qui n'avait aucune chance d'avoir été présente auparavant.
Derek, après de très brèves hésitations, estima que le salut était dans la fuite. Il suivit le même chemin qu'Allistair et, conséquemment, le même sort, mais lui sans mot de bienvenue. L'épéiste suggéra à Marcus de le laisser passer, idée que Marcus trouva raisonnable, et lui dit "Tu as bien combattu. Tu mérites de connaître mon nom. Je m'appelle Finndo", ce qui devait constituer un éclaircissement pour d'autres que nous. Finndo se jeta sur l'homme dont l'armure laquée blanc absorba intégralement le coup pendant que Marcus subissait le même sort que Derek. A cet instant, le joyau, qui était tombé au sol au cours du combat, disparu et je pus entendre l'envoyée de Morphée s'exclamer "La salope !". Finndo décida alors de reprendre le chemin par lequel il était entré au long duquel je cru pouvoir l'intercepter. Ma tentative pour le désarmer se solda par un échec cuisant dans la mesure où je fus désarmé et le poing de Finndo me percuta en pleine tête, m'envoyant rejoindre mes compagnons mais de manière standard cette fois.

Chapitre 2: Ambre vous avez dit Ombre
Nous nous réveillâmes dans une prison, ou plutôt dans un cul de basse fosse, enchaînés à la muraille. Nous étions détenus dans une geôle du plus pur style médiéval avec, pour unique compagnon, un homme avec lequel toute conversation s'avéra impossible. Si nos têtes nous rappelaient encore douloureusement nos avanies précédentes, la sienne l'avait quittée au point même que le plus éminent des psychanalystes aurait rapidement renoncé à entreprendre quelqu'action salvatrice. Alors que nous nous interrogions sur notre situation et dissertions sur le fait que nous puissions avoir le même cauchemar, nous vîmes passer devant nous deux gardes, vêtus de cottes de mailles et aux surcots représentant une licorne, qui ouvrirent une autre porte et s'y engouffrèrent. Nous entendîmes alors de brefs bruits de bataille et virent entrer, par la porte depuis laquelle les gardes étaient sortis, un homme en habits verts et noirs, sosie de notre compagnon d'infortune, accompagné de deux ogres. Ces derniers se dirigèrent vers le fou et le mirent rapidement en pièces alors que l'homme s'enquérait de l'objet de notre présence en ces lieux. Notre absence d'information dut le satisfaire dans la mesure où il repartit avec ses ogres, non sans nous dire "Je m'appelle Caine et je ne saurais trop vous conseiller d'oublier mon passage. Au revoir et protégez la Licorne".
Peu de temps après arriva l'homme à l'armure blanche, vêtu cette fois de blanc et d'argent, qui se présenta comme Julian et nous délivra tout en s'interrogeant de l'intérêt que nous portait Fiona. Ce nom ne nous évoquait rien mais nous l'avions, à juste titre, associé à la très amicale pourvoyeuse du royaume des songes. Nous fumes conduits à nos appartements par une charmante soubrette. Nous étions passés, sans comprendre ni le pourquoi ni le comment, du status de prisonniers à celui, bien plus confortable, d'hôtes. Notre accorte servante nous procura bains et vêtements, médiévaux cela s'entend, et plus d'interrogations que de réponses à nos questions. Au vu du ciel, du paysage, du décor et de l'ambiance générale, nous doutions d'être encore en Angleterre, voire même sur Terre. Nous apprîmes, entre autre peu, que nous étions en Ambre, la Terre réelle, que les habitants de ce lieu appelait notre Terre une Ombre et que le dîner serait servi dans deux heures dans la grande salle de réception.
Après nous être baignés, changés et interrogés, nous parcourûmes les couloirs du château pour finalement arriver dans le hall attenant à la grande salle de réception où de nombreuses personnes devisaient par petits groupes. Nous nous rendîmes alors compte que nous les comprenions parfaitement alors qu'ils ne parlaient pas l'anglais mais une langue que nous n'avions jamais pratiquée auparavant et qui nous paraissait encore plus familière et naturelle que celle que nous avions, jusqu'à présent, considérée comme maternelle. Sur ces considérations, arrivèrent Fiona, Julian et un homme qui, comme nous l'apprîmes rapidement, s'appelait Bleys et était le frère de Fiona. Il fut porté à notre connaissance, en même temps qu'à celle de l'assemblée, que le roi d'Ambre Random, accompagné de Bénédict, Gérard et Martin étaient partis au delà de l'Abîme pour tenter de ramener une de leurs soeurs, Deïdre, morte quelques années auparavant pendant la guerre de la chute de la marelle, et qu'ils avaient disparu. Pourquoi pas, nous étions déjà au delà de l'étonnement. En conséquence, Bleys se proclamait régent d'Ambre, titre que personne n'envisagea de lui disputer.
Nos compagnons de table étaient soit des ambassadeurs ou des dirigeants de royaumes proches, soit des amis de la famille royale d'Ambre, soit tout simplement des courtisans affairés. Nous apprîmes que nous étions sur la Terre réelle et que notre propre Terre n'était, à l'instar d'une infinité d'autres, que ombre, illusion de réalité, projetée par Ambre, la seule réalité tangible. Nous découvrîmes que l'univers des Ombres était bipolaire, d'un coté Ambre et la Marelle et de l'autre les Cours du Chaos et le Logrus. On nous informa également du fait que seuls les initiés de la Marelle, c'est à dire les descendants d'Obéron, premier roi d'Ambre, ainsi que ceux du Logrus, c'est à dire les Seigneurs du Chaos, avaient le pouvoir de marcher dans les Ombres ainsi que de les manipuler. On nous narra la guerre dite de la chute de la Marelle où cours de laquelle périrent Obéron, Eric, Deïrdre et Brand, instigateur de cette guerre, et à la suite de laquelle la Licorne avait désigné Random comme nouveau roi d'Ambre.
A la suite de ce repas, nous rencontrâmes Fiona qui nous déclara que nous nous trouvions en ces lieux de par sa décision. Elle nous avait, en effet, trouvés plus réels que les personnes de l'Ombre Terre et supposait que mes compagnons et moi-même pouvions être du sang d'Obéron, autrement dit des cousins. Elle nous fit alors descendre un très long, très sombre et très glissant escalier qui débouchait dans une pièce où nous vîmes la plus grande merveille du monde, la Marelle. Au lieu de dire nous, je devrais plutôt parler de Marcus et de moi-même dans la mesure où, si elle n'inspirait rien à Derek, elle donnait tout simplement envie de vomir à Allistair. Fiona nous expliqua que seuls ceux qui avaient du sang d'Obéron pouvaient la parcourir et, par la suite, marcher dans les Ombres et les manipuler. Marcus fut le premier à passer l'épreuve avec succès et je le suivis de peu, ce qui confirma les suppositions de Fiona. Nous remontâmes alors dans les salles du château et elle nous donna un exemplaire du jeu magique des Atouts, dont chaque carte représente soit un membre de la famille royale d'Ambre, descendant d'Obéron, soit un lieu, le château d'Ambre en l'occurrence. Nous découvrîmes ainsi que l'homme igné que nous avions vu à Londres était Martin, un des présumés disparus. Elle nous conseilla d'aller voir Julian en forêt d'Arden pour apprendre à manipuler les Ombres, après l'avoir contacté et aimablement suggéré de nous éduquer.
Sans plus de tergiversation, nous partîmes donc, en compagnie de Fiona, pour la forêt d'Arden, sise à deux heures de cheval du château d'Ambre. Peu avant Arden, Fiona nous quitta pour vaquer à de pressantes occupations. Nous nous retrouvâmes donc, seuls et sans armes, en pleine nuit dans une forêt totalement inconnue. Les bruits que nous entendîmes nous confirmèrent qu'Arden n'avait comme seul point commun avec nos forêts anglaises, que d'être justement une forêt. Percevant des bruits et mouvements divers en trajectoire convergente vers nos humbles personnes, il revint à nos mémoires le panégyrique de ces lieux, entendu au cours du dîner, à savoir loups, manticores et autres sympathiques animaux totalement herbivores et inoffensifs. En outre, nous n'avions pas la moindre idée du lieu de villégiature de Julian. Nous primes alors la décision, en toute sérénité et en toute quiétude, d'appeler Julian, via son atout, pour nous éviter une marche longue et certainement ennuyeuse. Julian eut la courtoisie de nous tendre la main pour nous faire arriver dans son campement et de nous offrir l'hospitalité de sa cabane.
Au petit matin, nous reprîmes nos montures et partîmes avec Julian sur le chemin des Ombres. Il nous expliqua les trois manières de marcher dans les Ombres et nous conseilla de nous exercer, pour le moment, à la plus simple et d'éviter la "chevauchée de l'enfer". Sur ces paroles, il nous laissa dans l'Ombre que nous avions atteinte en nous rappelant de nous fixer un but précis. Marcus et moi-même nous exerçâmes au déplacement dans les ombres et en profitâmes pour nous armer sur des cadavres de pauvres hères, dévorés par les loups, que nous étions certains de découvrir aux détours de chemins. Après quelques pérégrinations, nous revînmes au campement de Julian pour nous restaurer puis, n'ayant rien de précis à faire, nous repartîmes dans les Ombres. Au cours de nos déambulations, il vint à l'esprit de Derek qu'il avait peut-être le don pour dessiner des atouts mais pas la possibilité dans la mesure où tout son précieux matériel était resté à Londres. Je remédiai à ce problème en retrouvant ses papiers et sa boite à pinceaux au pied d'un arbre séculaire. Derek commença par dessiner un Atout de chacun d'entre nous, que nous répartîmes de manière à pouvoir établir une communication circulaire et à pallier le fait que seuls Marcus et moi savions manipuler les Ombres. Ensuite Derek croqua la "Dame en bleu" qui avait été l'élément initial de notre nouvelle vie et qui pourrait peut-être apporter quelques éclaircissements quant à notre situation et aux événements.
Quand l'esquisse fut terminée, Derek et Allistair se concentrèrent sur l'Atout et s'efforcèrent de la contacter. Leur tentative fut initialement couronnée de succès, dans la mesure où il la virent apparaître, mais très rapidement avortée car un importun, immédiatement classé dans la catégorie "sorcier hargneux", s'interposant entre eux et la Dame, les propulsa de plusieurs mètres en arrière par la force d'un seul mot. Ayant de la constance dans nos idées, nous refîmes une tentative quelques heures après, espérant que le dit sorcier serait parti déjeuner. Hélas pour Marcus, le sorcier devait certainement faire maigre et propulsa Marcus à une vingtaine de mètres, détruisant notre bel atout par la même occasion. Notre bel enthousiasme quelque peu refroidi, nous renonçâmes à sacrifier, pour l'instant, au célèbre adage qui aurait voulu que nous réitérerions une dernière fois notre tentative. Nous reprîmes alors le chemin d'Ambre après que Derek eu tiré le portrait de notre véhément sorcier, pour mémoire et surtout pour identification ultérieure.

Chapitre 3: Plus on est de fous plus on rit

De retour en Arden, nous constatâmes l'absence de Julian et décidâmes de l'appeler. Le contact fut aisément établi et nous vîmes que Julian, accompagné par un certain nombre de ses hommes, était dans le cimetière des princes d'Ambre situé au sommet du Kolvir. Nous lui montrâmes alors le portrait de notre sorcier en demandant tout simplement "Connaissez-vous cette personne ?". Il nous répondit qu'il avait un problème urgent à régler et qu'il nous recontacterait. Peu de temps après, Fiona arriva à cheval et nous demanda en quelle occasion nous avions vu cet homme. Trouvant la réponse de Julian quelque peu cavalière, nous nous montrâmes très évasifs et réitérâmes notre précédente question. Fiona se montra alors extrêmement chaleureuse et prit Marcus à part en lui disant "Allons, vous pouvez bien me dire comment vous l'avez rencontré". Pendant qu'ils déambulaient, Fiona continua sur le même ton léger et le même sujet et Marcus reposa toujours notre question. Au bout de quelques minutes, Fiona repartit comme elle était venue en disant "Merci, c'est tout ce que je voulais savoir". Non contente de ne pas avoir répondu à notre attente, la perverse avait discrètement été chercher ses réponses directement dans les circonvolutions neuronales de notre brave Marcus, nous plantant là fort mécontents.
Nous décidâmes alors de passer en revue tout notre jeu d'Atouts jusqu'à ce que nous obtenions notre réponse. Je contactai tout d'abord Flora, princesse d'Ambre et meilleure amie de Fiona, généralement associée par cette dernière au qualificatif de "Gourde". Elle ne refusa pas le contact et je la trouvai, fort peu vêtue, sur une plage attendant l'arrivée de quelqu'éphèbe. Elle me dit qu'elle ne voulait pas de mêler des affaires d'Ambre, mais révèla tout de même que notre sorcier était Dworkin. Sur cette foudroyante révélation, elle coupa la communication alors qu'approchait le maître nageur de service. Nous nous demandâmes alors dans quel complexe guêpier nous étions impliqués et décidâmes de rejoindre Julian au sommet du Kolvir. Sa réception ne fut pas particulièrement chaleureuse, quoique courtoise, et il partit régler un problème où il était, semble-t-il question d'apparitions et de disparitions en Ambre. Nous nous retrouvâmes ainsi seuls et sans le plus petit fil conducteur pour tenter de démêler cet écheveau typiquement ambrien. Marcus décida alors de contacter Finndo alors lequel il pensait avoir établi de bons rapports, fondés sur une estime musculaire réciproque. Le contact s'établit hélas parfaitement et notre ami Marcus partit rejoindre Finndo après un duel mental exceptionnellement bref. Nous apprîmes ainsi, à nos dépends et surtout à ceux de Marcus, que lors d'une communication par Atout il était possible d'initier un duel mental.
Nous nous retrouvions donc fort dépourvus, n'ayant pas le moindre début d'explication ni du pourquoi ni du comment des événements et étant par trop nouveaux en Ambre pour établir d'éventuelles corrélations avec des situations antérieures. Nous décidâmes de contacter les personnes de notre jeu d'Atouts jusqu'à ce que nous trouvions un allié dans la tempête. Les cartes d'Obéron, d'Eric, de Deïrdre, de Brand et de Caine ne fournissaient aucune réponse, signifiant que les personnes concernées étaient soit mortes, soit refusaient le contact. Celles de Random, Martin, Bénédict, Gérard et Corwin émettaient un écho surprenant et ne nous procurèrent également aucune réponse. N'attendant aucune aide de la part de Julian ou de Bleys, et encore moins de Fiona, il nous restait le choix entre Flora, Llewella et Merlin. Je choisis de contacter ce dernier, fils de Corwin, qui, à la suite de quelques explications, nous rejoignit au sommet du Kolvir. Il nous entraîna dans un bouge du port qui, selon lui, servait les meilleurs poissons. Nous lui narrâmes toute notre histoire en détail et lui exprimâmes notre sentiment d'impuissance et le fait que nous nous sentions comme des pions sur un échiquier dont on ne connaissait même pas les joueurs.
Merlin commença par nous narrer une partie de l'histoire d'Ambre pour nous permettre de mieux nous situer dans ce contexte géopolitique et perpétuelle mouvance. Nous apprîmes, entre autres, que, pendant la guerre de la chute de la Marelle, Obéron avait proposé à Corwin de devenir roi d'Ambre, que Corwin, pensant qu'Obéron avait échoué et que la Marelle d'Ambre était détruite, avait créé une nouvelle Marelle à l'aide du joyau du jugement et que Bleys et Fiona avaient presque toujours été au centre des magouilles politiques d'Ambre. Il confirma ensuite à Allistair que, curieusement mais indubitablement, il était du sang du Chaos et que la méthode de contact utilisée par la "Dame Bleue" correspondait aux techniques des initiés du Logrus. Nous lui parlâmes ensuite des Atouts aux étranges échos et lui confiâmes celui de Bénédict. Il se concentra dessus et tenta de forcer le contact. Rapidement une fumée commença à émaner de la carte et, pour finir, l'Atout se consuma brutalement. Pour conclure, n'ayant pas d'élément explicatif à nous fournir, Merlin nous raconta l'histoire de son père dans les geôles d'Ambre et nous indiqua un moyen d'accéder au laboratoire secret de Dworkin, notre vindicatif sorcier. Le repas terminé, Merlin repartit pour les Cours du Chaos et nous vers le château pour expérimenter sa solution.
Nous descendîmes directement dans les geôles du palais pour retrouver l'ancienne cellule de Corwin. Arrivés sur les lieux, nous découvrîmes une sombre prison sur les murs de laquelle étaient tracés un paysage représentant le phare de Cabra, le simili Atout qui avait permis à Corwin de s'évader, ainsi qu'une esquisse du laboratoire de Dworkin. Nous nous aperçûmes que les précieux dessins étaient légèrement recouverts de mousse et qu'un minutieux travail de restauration s'avérait nécessaire avant toute tentative d'utilisation. Après avoir été chercher des brosses, nous nous mimes au travail pour, au bout de plusieurs heures, enfin complètement dévoiler l'Atout, objet de notre convoitise. Derek se concentra et nous permis d'accéder au laboratoire secret qui, fort heureusement, était vide. J'entendis alors des voix provenant des appartements de Dworkin et me rapprochai de la porte qui y menait. Je pus surprendre des bribes de conversation entre Bleys Fiona et Dworkin où il était question de la "Dame en Bleu" et du peu d'importance résultant du fait qu'elle s'était échappée. Me rendant compte que nos trois comparses avaient terminé leur entretien et s'apprêtaient à revenir dans le laboratoire, nous cherchâmes une échappatoire.
N'ayant pas le temps d'utiliser l'atout d'Ambre pour quitter immédiatement ces lieux, je me dirigeai vers une porte à double battants, donnant dans le laboratoire. Alors que j'entrebâillai la porte et tentai de percer l'obscurité de la pièce sur laquelle elle donnait, Allistair, complètement paniqué, me propulsa à l'intérieur et en profita pour entrer avec Derek. En complet déséquilibre, je me trouvai face à face avec un agressif et massif griffon violet qui me prit pour son dîner. Alors que je m'efforçai d'esquiver ses attaques, Allistair et Derek préférèrent revenir dans le laboratoire en saluant Fiona, Bleys et Dworkin d'un "Bonjour" théâtral. Découvrant des intrus dans son repaire, Dworkin, furieux, entama une hallucinante transformation qu'il interrompit lorsque Fiona réussit à le calmer. Quant à moi, je fus fort aise quand Dworkin ordonna à son griffon d'abandonner sa proie et je rejoignis mes amis dans le laboratoire en tenant ma poitrine qui avait subi l'agression d'un bec tranchant. Après quelques explications, nous posâmes à Dworkin une question fort anodine, "Connaissez-vous Finndo ?". A ces mots, le maître de céans recommença à se transformer. Bleys se jeta alors devant Fiona pour la protéger de l'attaque du griffon et moi-même, je m'interposais entre Dworkin et mes amis. Nous quittâmes tous précipitamment ce lieu devenu insalubre, Bleys et Fiona grâce à un sort de cette dernière et nous au travers de l'atout d'Ambre.

Chapitre 4: Un Chaos bien en cour
Arrivés devant le château d'Ambre, nous commençâmes par reprendre nos esprits et notâmes, dans un coin de notre mémoire, les étranges et inquiétants effets qui peuvent résulter du seul nom de Finndo. Allistair eut alors l'idée que Dworkin, étant quelque peu indisposé, ne devrait pas pouvoir d'interposer entre nous et la Dame en Bleu et tenta immédiatement de la contacter. Il la vit à cheval, poursuivie dans une Ombre non identifiée, et lui proposa de la faire venir en Ambre. Après de brèves hésitations, elle prit la main tendue d'Allistair et nous rejoignit. Nous vîmes alors qu'elle portait le joyau du jugement autour du cou, objet qu'Allistair lui recommanda de camoufler, surtout en ce lieu. Elle nous remercia mais ajouta qu'elle ne pourrait pas rester et qu'il n'était pas prudent d'être actuellement en sa compagnie. Lorsque nous lui en demandâmes la raison, elle tendit sa main, désignant quelque chose derrière nous, en disant "A cause de ceci". Allistair et moi nous retournâmes immédiatement alors que Derek, restant les yeux rivés sur elle, lui répondit "Celle là, on me l'a déjà faite". Nous vîmes la réalité se déchirer et deux golems en jaillir. Je pus, de ce fait, éviter l'attaque de l'un d'entre eux alors que le pauvre Derek, n'ayant rien vu venir, fut envoyé au tapis, l'épaule broyé par un poing massif et glacé. Je m'attachai alors à occuper les deux golems pendant qu'Allistair, s'étant saisi de l'atout de Merlin, appelait à l'aide et que notre Dame, s'étant fait pousser des ailes, au propre et non au figuré, s'éclipsait dans une échappatoire aérienne en disant "A bientôt mes enfants". Merlin répondant heureusement à notre appel, nous le rejoignîmes dans les Cours du Chaos, abandonnant nos deux golems.
Voyant notre état, Merlin nous emmena chez un guérisseur qui n'eut aucun mal pour panser ma blessure, standard s'il en est, mais se trouva assez dépourvu pour soulager Derek de l'étrange froid qui avait accompagné le coup du golem. arrivés dans les appartements de Merlin, nous lui narrâmes les résultats de nos investigations et notre brève entrevue avec la Dame en Bleu. Il nous confirma qu'une pousse d'ailes impromptue était un pouvoir de métamorphose de ceux qui possédait du sang du Chaos. Il ajouta qu'il s'était renseigné au sujet de la dite Dame, preuve que le temps en Ambre et aux Cours du Chaos ne s'écoule pas de la même manière, et qu'elle avait été vue, il y a quelque temps, en compagnie du duc Crios, seigneur d'un des plans primaires du Chaos. Elle semblait au mieux avec ce duc et apparaissait comme une personne de haut lignage. Nous obtenions enfin une première piste mais nous n'étions pas vraiment enclins à la suivre.
Alors que nous étions plongés dans de profondes mais infructueuses spéculations, Allistair rappela à Merlin qu'il l'avait identifié comme fils du Chaos et que, en conséquence, il aimerait bien voir le Logrus, voire même s'y initier. Merlin nous proposa alors de rencontrer son mentor et maître en sorcellerie, Suhuy, qui faisait partie de ceux qui appréhendaient le mieux le principe même du Logrus. En chemin, il informa Allistair de la difficulté de l'épreuve et lui déclara que lui même avait pris le temps de le comprendre avant de s'y risquer, ce qui amena Allistair à répondre "Je désire tout d'abord le voir. J'aviserai ensuite". Nous rencontrâmes Suhuy, personne replète et d'apparence inoffensive, qui nous conduisit au travers des méandres caverneux des Cours du Chaos et nous fit descendre par un escalier en continuelle et spasmodique mouvance. En cours de route, il signala à Allistair que le Logrus n'avait que peu de points communs avec la Marelle et que, contrairement à ceux d'Ambre, ils n'éprouvaient pas le besoin de garder le Logrus qui, selon ses propres mots, "se défendait très bien tout seul", ce qui ne fit qu'accentuer notre inquiétude. Nous arrivâmes dans une grande caverne au travers de laquelle trônait la chose la plus étrangère qui m'ait été donnée d'apercevoir et à la vue de laquelle je ne pourrai jamais m'habituer. Alors qu'il n'inspirait rien de particulier à Derek, il exerça sur Allistair une fascination immédiate.
Suhuy expliqua à Allistair que, contrairement à la Marelle, le Logrus ne devait pas être parcouru mais traversé et que toute la difficulté résidait dans son perpétuel changement de structure qui nécessitait, de la part du candidat à l'initiation, une continuelle adaptation. Il continua sur les trois techniques de métamorphose des fils du Chaos en précisant que, pour traverser les Logrus, il était nécessaire de bien les maîtriser, non seulement pour survivre mais également pour pouvoir en ressortir. Ce panégyrique du Logrus refroidit sensiblement notre ami Allistair qui renonça, pour le moment, à risquer l'expérience. Allistair commença alors à spéculer sur ses capacités à se transformer pendant que Suhuy incantait. Brusquement, un feu apparu au milieu de la salle et Allistair sentit sa main irrésistiblement attirée vers le dit feu alors que Suhuy affirmait que "La meilleure manière de prendre conscience de ses facultés d'adaptation et d'y être obligé et d'être pris par surprise". Allistair tenta de transformer la structure de sa main pour la protéger contre le feu mais n'y réussit point. Suhuy arrêta alors l'attraction qu'il exerçait et disant "manque de spontanéité. Vous avez tenté ce qui est le plus difficile au lieu de simplement laisser votre corps réagir". Après que Merlin eut soigné les brûlures d'Allistair, ils me rejoignirent en haut de l'escalier. J'avais, en effet, rapidement quitté la caverne du Logrus pour éviter à mon déjeuner de rajouter de nouvelles couleurs aux murs de la salle.
Alors que nous étions dans un des salons des Cours, Allistair sentit un contact d'Atout. Oubliant totalement que la seule personne à posséder un Atout de lui était Marcus, il déclara "C'est certainement la Dame en Bleu" et accepta le contact. Nous le vîmes brutalement se figer et engager un duel de volonté avec un adversaire invisible que nous présupposions être Finndo. Au bout de quelques minutes, Allistair eut un nouveau trait de génie. En déclarant "Il doit falloir se comporter comme avec le Logrus, se laisser attirer pour être repoussé", il joignit l'acte à la parole et disparut. Merlin nous informa, par la suite, qu'il était possible d'aider une personne dans un duel mental en établissant un contact avec elle, soit au travers du Logrus, soit avec un Atout le représentant.
Derek et moi nous sentîmes de plus en plus ballottés par les événements et devisons sur la conduite à tenir lorsqu'un groupe de jeunes gens des Cours du Chaos entrèrent dans la salle ou nous étions. Ils semblaient informés de la présence de personnes d'Ambre en ces lieux et leur meneur commença à proférer des insultes, cherchant visiblement un affrontement. Il s'approcha alors de moi et m'envoya un soufflet que je n'esquivai que très partiellement. Je lui proposai alors une passe d'armes et il sauta en arrière, tirant son sabre. Ainsi commença un long affrontement au cours duquel je le blessai au bras en réponse à la blessure qu'il m'avait infligée au poignet. Par la suite, profitant d'un instant de déconcentration de ma part, il m'entailla profondément au coté. Je tentai alors d'abréger le combat par de violentes et continuelles attaques mais, en excellent bretteur, il refusa l'affrontement direct, s'efforçant de me garder à distance. Enfin, ayant succombé à l'épuisement, il paracheva sa victoire en me désarmant. Mon vainqueur, dénommé Arnoï, nous donna alors une heure pour quitter les Cours.
Ne me sentant absolument pas en état pour un nouveau duel, nous décidâmes d'optempérer et contactâmes Llewella qui nous accorda gracieusement l'hospitalité à Rebma. Ayant posé nos questions rituelles, Llewella nous apprit que Finndo était le second fils d'Obéron, né d'un premier mariage que ce dernier avait dissout ab initio pour faire de la mère d'Eric la reine d'Ambre. Seul détail curieux, il était considéré comme acquis que Finndo et son frère Osric étaient morts au cours d'une bataille contre des nations du cercle d'or. Bataille qui avait finalement été gagnée par leur troisième frère Bénédict, celui-ci arrivant trop tard pour les sauver. Il semblait, en outre, que le retard de Bénédict ait été dû au très paternel Obéron qui n'appréciait que modérément les visées royales de ses deux premiers fils. Je ressentis alors une tentative de contact par Atout que je refusai, sachant que la seule personne à avoir mon Atout était notre dernier disparu, à savoir Allistair. Après une légère collation, je me dirigeai vers ma chambre pour tenter de trouver un sommeil réparateur. Hélas, alors que je m'endormais, Finndo me contactais à nouveau et je ne pus, cette fois, lui résister. Après m'avoir assommé, il me traîna jusqu'à la chambre de Derek, activa un Atout et nous jeta tous les deux sur le parvis d'un château qui ressemblait quelque peu à celui d'Ambre si ce n'étaient les étranges créatures qui le gardaient.

Chapitre 5: Dans le reflet de la Réalité
Nous retrouvâmes ainsi, je n'irais pas jusqu'à dire avec joie et félicité, nos deux amis Marcus et Allistair, en compagnie d'une personne dont la présence ne manqua pas de nous surprendre, voire même de nous stupéfier. Marcus nous conta alors ses errances, depuis le moment où il nous avait quitté, ainsi que ses déductions. Il avait rapidement constaté que le lieu où il avait cordialement été invité par Finndo ressemblait furieusement à Ambre, enfin plutôt à un reflet ou une ombre de la véritable Ambre. Le cours de son histoire était similaire à celle que nous connaissions jusqu'au moment où, quelques centaines d'années après la bataille contre les nations du cercle d'or, Finndo était revenu avec une armée d'homme chiens et avait conquis Ambre. Au cours des années qui suivirent, il élimina tous ses parents, les uns après les autres, pour régner sans partage. Le seul qui survécu à ce massacre fut Dworkin, apparemment plus par chance que par mansuétude de la part de Finndo. Marcus expliqua ensuite qu'il avait tenté, sans succès, de marcher dans les Ombres projetées par cette Ambre jusqu'au moment où il avait parcouru la Marelle ad hoc. En compagnie d'Allistair, arrivé entre-temps, ils étaient partis dans les Ombres en direction de notre Terre et, plus spécifiquement de Londres. Hélas, arrivés sur place, il s'avéra que l'Ombre Terre n'était qu'un pale reflet de celle que nous connaissions. Nous étions donc prisonniers d'une autre réalité dont seul Finndo pouvait s'échapper.
Marcus et Allistair n'avaient pas collecté cette somme d'informations et d'expériences par leurs seules investigations. Ils avaient bénéficié d'un semblant d'aide de la part d'un Dworkin, tremblant au seul nom de Finndo, et surtout du soutien d'Eric qui, dans notre Ambre, était censé être mort durant la guerre de la chute de la Marelle. Son inexplicable arrivée en ces lieux depuis quelques jours associée au fait que le reflet d'Eric avait jadis été tué par Finndo nous fit supposer que nous avions devant nous le véritable Eric. Grâce au nouveau jeu d'Atouts que nous avions obtenu de Dworkin, nous tentâmes de contacter les autres membres de notre famille, mais sans succès. Nous en déduisîmes que ces Atouts correspondaient à ce reflet d'Ambre et ne nous permettaient pas d'atteindre notre Ambre. Nous commençâmes alors à nous interroger sur le comment de ce reflet. Connaissions déjà Rebma, reflet d'Ambre dans la mer, et Tir-na Nog'th, reflet d'Ambre dans le ciel. Après moult spéculations, nous convînmes que nous étions prisonniers du reflet d'Ambre dans le joyau du jugement et que la bague de Finndo correspondait au reflet de celui-ci dans lui-même.
Je proposai deux possibles solutions pour nous échapper. La première consistait à parcourir la Marelle et, en son centre, de lui demander de nous envoyer dans l'Ambre véritable. La seconde exigeait, de la part de Derek, la constitution d'un Atout du laboratoire de Dworkin en espérant que ce lieu n'existerait pas ici et que nous retrouverions, avec plaisir cette fois, notre charmant ami le griffon violet. Après de brèves délibérations, nous optâmes pour la seconde solution qui, contrairement à la première, n'excluait ni Derek ni Allistair, encore que ce dernier aurait pu tenter de faire de même avec le Logrus. Nous arrivâmes, en compagnie d'Eric, dans le laboratoire secret de Dworkin et notâmes, avec un fort désappointement, qu'il n'était également qu'un reflet. Nous tentâmes, tout d'abord, d'ouvrir la porte qui conduisait aux appartements du maître de ces lieux et, devant l'inanité de nos efforts, ouvrîmes la porte donnant sur la bête. Cette dernière étant particulièrement anémiée, nous l'évitâmes sans difficulté et débouchâmes à l'air libre. Devant nous s'étendait une autre Marelle, bien plus brillante que celle du château, qui était, comme nous l'apprîmes par la suite, la Marelle originelle de cette Ambre. Agenouillé devant elle se trouvait Dworkin qui, en nous entendant, se retourna complètement paniqué et dit "Mais vous n'auriez jamais dû venir ici. C'était la seule retraite qui me restait. Maintenant il va savoir. Tout est perdu". Sur l'instant nous restâmes quelque peu interloqués, ne sachant quelle conduite adopter. Les événements décidèrent alors pour nous sous la forme de la voix de Finndo qui, venant de derrière nous, déclarait "Exact vieux fou. Voici un endroit que je ne connaissais pas. Maintenant tout est dit".
A ces mots, nous nous retournâmes de concert et découvrîmes Finndo, émergeant du tunnel, son épée à la main. Il se dirigea, d'un pas assuré, droit vers un Dworkin prostré et nous nous écartâmes de son chemin comme il l'exigeait. Cependant, faisant un détour, je me dirigeai également vers sa cible par la gauche alors qu'Eric faisait de même par la droite. Marcus et Allistair laissèrent passer Finndo puis le suivirent, attendant une ouverture pour l'assaillir. Finndo se jeta alors brusquement sur moi et je ne dû qu'à mes réflexes de ne pas avoir le bras tranché par la plus terrible attaque qu'il m'ait été donné de voir et surtout de subir. Ne me sentant pas la capacité d'engager un duel classique avec ce monstre de combat, je tentai alors de raccourcir la distance entre nous pour profiter de mon arme plus courte. Mais cette manoeuvre, qui aurait réussie contre la plupart des adversaires, se solda par un coup terrifiant qui, quoique retenu, m'entailla profondément la poitrine et me fit perdre connaissance. Pendant ce temps, Marcus avait chargé Dworkin sur ses épaules et Derek se concentrait sur un Atout. Avant qu'ils n'aient réussi à complètement disparaître, Finndo était sur eux et Marcus ne dut qu'à une parade d'Eric de ne pas être transformé en Mar et Cus. Dworkin disparu, le combat s'arrêta et Finndo déclara "De toute manière, maintenant ce n'est plus qu'une question de temps".
Toujours inconscient, je fus ramené au château par Allistair et Eric. Ce dernier me soigna et ajouta "S'il a du sang d'Ambre, il s'en remettra". Du haut de mon inconscience, je savais désormais quelles devaient être mes couleurs. Le Noir et le Pourpre, non tant que ces couleurs se marient bien mais surtout qu'elles permettent de moins voir le sang que je répandais allègrement depuis que j'avais quitté Londres. Incidemment, nous avions collecté de nombreux renseignements qui, s'il n'éclairaient pas vraiment notre situation, nous permettaient d'entrevoir une échappatoire, d'autant plus que Finndo avait déclaré qu'il s'expliquerait bientôt sur la raison de notre présence. Tout d'abord nous savions maintenant que notre dame en Bleu était Cymnéa, première épouse d'Obéron et mère d'Osric, de Finndo et de Bénédict, qui avait disparu d'Ambre un an avant la bataille contre les nations du Cercle d'Or. Nous avions également eu, de la part de Dworkin, de cruciales révélations sur Ambre, notamment qu'Ambre elle-même n'est qu'une Ombre projetée par la Marelle originelle. Nous le questionnâmes ensuite, pour mieux appréhender notre lieu de villégiature et également pour trouver un moyen d'en sortir, dans la mesure où il était certainement la personne qui possédait la meilleure compréhension sur le fonctionnement des Ombres. Las, nous nous heurtâmes alors à un problème de postulat de base. Pour lui, nous étions dans la véritable et seule Ambre, qui était issue de la Marelle originelle qu'il avait tracée avec son sang et l'aide de la bague du jugement, que lui avait confiée la Licorne. Même lorsqu'il admit de prendre comme pure hypothèse que nous étions dans un reflet et que nous désirions revenir dans l'Ambre véritable, il ne put pas nous fournir de véritable solution dans la mesure où il n'avait pas de point de comparaison.
Après que Dworkin se fut éclipsé, Marcus et Derek nous rejoignîmes au château. Alors que nous échafaudions les plans d'évasion les plus échevelés, comme de nous rendre dans les Cours du Chaos en espérant que celles-ci ne soient pas également un reflet, on frappa a notre porte. Marcus alla l'ouvrir et se fit remettre, par un serviteur, un message anonyme nous invitant à nous rendre dans les communs. Marcus et Allistair décidèrent de répondre à cette invitation pendant que Derek commençait à tracer un Atout des Cours du Chaos pour subvenir au plan susmentionné. Arrivés sur les lieux, ils rencontrèrent un homme fort bien bâti, répondant au nom de Faïd Imla, qui déclara rechercher des alliés contre le tyran Finndo. Ce fort curieux personnage leur expliqua qu'il était originaire de la ville d'Ambre et qu'il exerçait la noble profession de mercenaire, ce qui, en l'observant, pouvait se traduire par exécuteur des basses et hautes oeuvres, et qu'il n'était pas ici de sa propre initiative. Un homme qui s'insinuait depuis quelque temps dans ses rêves pour l'empêcher de s'éloigner d'Ambre lui avait fait boire une potion, dont il ne connaissait pas la composition, et lui avait ordonné de nous rencontrer. Obtempérant à cet inquiétant personnage, il s'était introduit dans le château et se proposait de nous en faire sortir pour rencontrer son commanditaire. Après quelques explications complémentaires, mes amis convinrent d'un rendez-vous une heure après et remontèrent dans nos appartements. Marcus, Allistair et Derek décidèrent de suivre cet homme et de me confier à Eric, promettant de revenir dans quelques heures.

Chapitre 6: De retour en Ambre
Faïd expliqua qu'il était arrivé au château en escortant un marchand et qu'il comptait nous en faire sortir, cachés dans un des chariots. Pour ce faire, il soudoya l'un des conducteurs et compléta sa négociation par des menaces franches et définitives pour dissuader ce dernier d'envisager toute trahison. Arrivés en ville, nous nous éclipsâmes discrètement et élimes domicile dans une auberge des bas fonds. Alors que nous nous étions installés dans une chambre où la crasse tenait lieu de crépis, Faïd prit nos vêtements de cours quelque peu voyants pour les échanger contre des fripes plus en adéquation avec la faune locale. Il revînt quelques heures plus tard avec nos nouveaux habits, légèrement élimés mais somme toute fort propres, un repas à la qualité douteuse et de nombreuses bouteilles de vin. Pendant qu'il éclusait les dites bouteilles à la vitesse d'une pompe aspirante, nous nous efforçâmes de le faire parler pour tenter de mieux cerner ce personnage auquel nous n'accordions qu'une confiance très limitée. Nous apprîmes ainsi, en autres, que sa mère était morte alors que sa soeur cadette et lui étaient encore très jeunes, qu'ils ne connaissent pas leur père, qu'ils étaient tous deux mercenaires, voire même pirates à leurs heures, qu'il avait la mentalité d'un contrebandier corse, que son commanditaire ressemblait à Brand en plus jeune et qu'il s'effondrait après cinq litres de vin.
Après qu'il se soit assoupi, nous entreprîmes de le fouiller dans l'espoir d'obtenir de plus amples informations. Alors que Marcus inspectait le contenu de sa bourse, fort fournie au demeurant, nous fûmes surpris de le voir se redresser et déclarer, d'une voix très claire, "Pensez-vous que votre comportement sied à des seigneurs d'Ambre ?". Nous comprimes immédiatement que nous avions maintenant affaire au commanditaire dont l'esprit s'était substitué à celui de notre ivrogne. Après quelques formules de politesse, nous entamâmes une conversation qui ne nous apprit rien de précis sur notre nouvel interlocuteur si ce n'est qu'il était du sang d'Ambre, que ses parents avaient été tués par Finndo et que depuis il se cachait en attendant l'occasion de les venger. Le plus ardu fut de lui faire admettre que nous étions dans un reflet d'Ambre et de lui faire prendre conscience de toutes les implications. Après quelques tergiversations, il accusa le coup avec, tout de même, une certaine classe en déclarant qu'il valait toujours mieux être un reflet qu'une ombre. Nous en étions là lorsque des bruits extérieurs attirèrent notre attention. En se penchant à la fenêtre, Marcus se rendit compte que les hommes-chiens de Finndo s'étaient répandus en ville et fouillaient méthodiquement chaque bâtisse. Le commanditaire préféra alors s'éclipser et Faïd, émergeant de feu sa torpeur vinicole, sortit de la chambre pour tester l'ambiance de l'auberge. Il revînt très rapidement et, tout en déclarant que l'aubergiste nous avait trahie et qu'il l'égorgerait avec plaisir plus tard, entreprit d'entasser armoires et lits contre la porte. Ne voyant aucune échappatoire normale à notre situation, Derek sortit un Atout de Londres, qu'il avait précédemment tracé, et nous nous éclipsâmes de concert.
Arrivés à Londres et habillés selon les coutumes vestimentaires locales, nous nous rendimes dans le reflet de notre ancien club et primes un repas digne de ce nom. Faïd, quant à lui, trouva la nourriture fade et entreprit de tester conséquemment les vins du cru. Tout en nous restaurant, nous convînmes d'aller à Rebma pour tenter d'y trouver des alliés. Après un passage dans les écuries du champ de courses et un voyage dans les Ombres, nous arrivâmes au pied de l'escalier qui conduisait à la cité sous-marine de Rebma. Nous descendîmes dans les profondeurs en faisant bien attention à rester au centre du monumental escalier et poussâmes les portes de la cité. Arrivés dans le hall d'entrée, nous fûmes fort marris de rencontrer à nouveau des hommes-chiens, mais eux encore plus. A la suite de cette échauffourée, nous nous ruâmes vers la salle de la Marelle et y pénétrâmes après que Faïd eût crocheté la porte avec un art consommé. Après que nous eûmes refermé et barricadé la porte, force nous fut de constater qu'il n'existait aucune voie de sortie autre que celle procurée par la Marelle. Marcus se saisit alors de la dague de Faïd et la lui agita sous le nez, ce qui eut pour conséquence, comme il nous l'avait été indiqué, d'appeler le commanditaire. Alors que Derek et Allistair étaient impuissants face à la situation, Marcus et notre étrange compagnon entreprirent de parcourir la Marelle. Arrivés en son centre, ils demandèrent à être transportés à coté de la Marelle primordiale de ce reflet, et disparurent alors que la porte d'entrée explosait sous les coups de boutoirs des membres d'une race canine hypertrophiée. Derek et Allistair furent ramenés, sous bonne garde, dans nos appartements.
Pendant ce temps, Marcus et Faïd découvrirent que l'antre de Dworkin était maintenant gardée par une douzaine d'hommes-chiens et entreprirent d'assainir les lieux. Lorsque Derek contacta Marcus, nous convînmes de changer, une nouvelle fois, de domicile et, en compagnie d'Eric, nous installâmes dans les appartements de Dworkin. Allistair, Eric et Marcus décidèrent alors d'explorer notre nouvelle demeure et s'engagèrent dans un long corridor qui, dans notre Ambre, était gardé par le fameux griffon violet. Hélas, le passage s'avéra rapidement difficilement praticable en raison de l'absence de moyen d'éclairage à notre disposition. Après diverses tentatives, Allistair réussit sa première transformation en adaptant ses yeux à l'obscurité et proposa à Eric de le suivre. Après quelques minutes de marche, ils arrivèrent dans une gigantesque caverne dans laquelle débouchaient une vingtaine de corridors. Ils en étaient à se demander lequel ils allaient emprunter lorsqu'il leur sembla entendre un bruit de galop qui se rapprochait. Allistair transforma alors ses oreilles pour mieux en discerner la provenance, la méthode appliquée semblait au point . Alors qu'ils approchaient du couloir, origine du bruit, les événements se précipitèrent.
Du corridor, justement identifié, jaillit la Licorne et, l'instant d'après, une violente lumière incendiaire inonda la caverne. Encore sous l'effet de sa transformation oculaire, Allistair fut complètement aveuglé et, sous l'emprise de la peur, entreprit de se transformer pour mieux fuir. Il se muta instantanément en une créature non identifiée qui détala à une vitesse stupéfiante. Pendant ce temps, Eric se trouva engagé dans un combat à mort avec un Bénédict, complètement entouré de flammes, alors que la Licorne hennissait de peur. Rapidement acculé par un implacable Bénédict, Eric ne dut sa survie qu'à l'arrivée de Faïd qui lui permit de se désengager. Après une fuite éperdue, ils nous rejoignirent et nous entreprîmes de barricader l'entrée de notre refuge lorsqu'ils nous apprirent l'arrivée imminente de l'être igné. Alors que la porte brûlait et que nous nous apprêtions à livrer notre dernier combat, nous entendîmes, à nouveau, le hennissement de la Licorne. Ceci eut pour effet de détourner de nous la vindicte de Bénédict qui s'élança à sa poursuite. Nous nous rappelâmes alors la phrase de Caine qui nous avait semblé, au prime abord, une simple formule de politesse, "Protégez la Licorne".
Alors qu'Allistair émergeait avec peine de l'état de catatonie qui avait fait suite à sa dernière transformation, Marcus et le commanditaire de Faïd décidèrent de parcourir la Marelle primordiale pour tenter de rejoindre notre Ambre. En son centre, il demandèrent à être transportés dans la salle de la Marelle du château d'Ambre, la véritable naturellement. Grande fut la joie de Marcus de constater que, cette fois, leurs efforts avaient été couronnés de succès. Après que Faïd eût crocheté la serrure, ils remontèrent prudemment le grand escalier qui conduisait aux salles du château. Chemin faisant, ils rencontrèrent un garde, humain et portant les couleurs de l'Ambre que nous connaissions, une Licorne blanche sur fond vert. Home, sweet home. Arrivés en ses appartements, Marcus fit porter un message à Fiona et tenta, sans succès, de contacter Derek. Peu de temps après arriva Fiona qui, sans autre forme de politesse, demanda "Mais où étiez vous donc passés". A la suite de quelques rapides explications, Fiona demanda à Marcus de reparcourir par l'esprit la Marelle du reflet, pendant qu'elle observerait le processus. Lorsqu'il eût fini, il s'aperçut que la dite Marelle dansait devant ses yeux et Fiona demanda à Marcus de contacter, à nouveau, Derek. Il obtempéra et obtint rapidement le contact. Eric me prit alors dans ses bras et, tenant l'épaule de Derek, nous tentâmes de passer. Derek, et Allistair rejoignirent Marcus mais Eric, et moi-même par voie de conséquence, fut repoussé en arrière.
Mes amis entreprirent de narrer à Fiona nos aventures et les conclusions auxquelles nous avions abouties, notamment que Finndo préparait l'invasion d'Ambre depuis son reflet et que sa bague devait correspondre au reflet du joyau du jugement dans lui-même. Elle trouva cela à la fois très intéressant et très inquiétant, d'autant plus qu'Ambre faisait actuellement l'objet d'une attaque de grande envergure, conduite par des êtres ignés. Le seul élément que nous passâmes sous silence, et qui aurait très certainement intéressé Fiona, était le nom de la Dame en Bleu, détentrice du joyau du jugement. Fiona demanda à notre nouveau compagnon qui il était. Il ne chercha pas, cette fois, à tergiverser et déclara se nommer Imra Bayle, fils de Vinta Bayle. Cette révélation, si elle n'eut pas l'heur d'étonner Fiona, ne nous apporta aucun éclaicissement. Après quelque repos, Allistair appela Merlin pour approfondir ses connaissances de l'art de la transformation et Marcus contacta Eric pour le tenir au courant des derniers événements. Quant à moi, quoique toujours prisonnier, je me remettais doucement et recommençais à me déplacer par mes propres moyens. Deux jours après mon combat avec Finndo, cela ne conférait pas au miracle mais, tout simplement au sang d'Ambre.

Chapitre 7: Le retour d'Eric
Après qu'Allistair lui ait narré nos dernières mésaventures, Merlin le remercia tout d'abord de ses informations et lui expliqua qu'il n'avait actuellement, à son grand dam, pas le temps de s'y intéresser personnellement en raison de l'examen que Suhuy allait lui faire subir. Il le félicita, ensuite, au sujet de ses transformations et entreprit de lui en expliquer les dangers. Lorsque l'on procède à une mutation, il est impératif de parfaitement la contrôler et de la stopper lorsque le résultat attendu a été atteint. Dans le cas contraire, elle se poursuit d'elle même et la conscience du sujet risque d'être également transformée, ce qui était arrivé à Allistair dans la grotte avec la Licorne. Il rajouta que le pouvoir de métamorphose était l'apanage du sang du Chaos et qu'il était possible que les seigneurs d'Ambre aient cette faculté. Revenant sur les derniers événements d'Ambre, il conseilla à Allistair de ne pas en parler dans les Cours du Chaos dans la mesure où certains de ses membres pourraient profiter de la faiblesse actuelle d'Ambre pour tenter de la détruire. Pour finir, il dit de faire très attention à lui près d'une Marelle dans la mesure où, en ces lieux, le sang du Chaos était très volatil et se consumait.
Après une nuit de repos, mes amis profitèrent du petit déjeuner pour élaborer leur nouvelle stratégie à court terme. Ils envisagèrent, tout d'abord, une nouvelle tentative de contact avec Caine, durant laquelle les volontés de Derek et Allistair seraient associées pour forcer l'appel, bien qu'ils fussent parfaitement conscients que cet essai avait peu de chances d'aboutir. C'est alors qu'Allistair déclara "Mais si ça marche, que puis-je lui répondre pour éviter d'être désintégré sur place, lorsqu'il me dira "que veux-tu mortel ?". La minute de silence qui fit suite à cette hypothèse qui, bien qu'exagérée, était loin d'être dénuée de fondement, fut interrompue par la réponse de Marcus "Tu n'as qu'à lui dire que nous avons vu la Licorne et qu'elle est en danger". Allistair, ayant été convaincu du caractère judicieux de cette entrée en matière, mes amis effectuèrent leur tentative et échouèrent, comme prévu initialement. Peu de temps après, Derek s'attacha à dessiner un Atout de moi, en y incluant la Licorne, pour tenter de lui conférer un caractère plus réel, pendant que Marcus partait à la recherche du très mystérieux Imra Bayle. En interrogeant les serviteurs du palais, il apprit rapidement que ce dernier était parti en ville à l'aube, en quête de Vinta Bayle, et décida d'attendre son retour au château pour obtenir les réponses aux questions auxquelles notre inquiétant compagnon n'avait toujours pas répondu.
Quand Derek eût terminé son Atout, Marcus parcouru la Marelle du reflet dans son esprit et me contacta. Il me vit, allongé sur mon lit en train de m'ennuyer ferme, alors que deux hommes-chiens montaient la garde dans ma chambre. Le plus discrètement possible, je saisis la dextre qu'il me tendait et fut promptement ramené en Ambre, au grand dam de mes gardes qui ne purent qu'aboyer leur désappointement. Après l'émotion des retrouvailles, nous constatâmes que mon Atout ne ferait plus d'usage malgré les nouvelles techniques mises en oeuvre par Derek. Alors que nous tenions un mini conseil de guerre dans ma chambre, on frappa à la porte. C'était Flora qui venait nous convier à déjeuner avec la reine Vialle à midi. Cette invitation nous fit très plaisir mais apporta également son lot de problèmes dans la mesure où cette chère Flora, s'étant horrifiée sur le caractère tristement moyenâgeux de nos vêtements, nous demandait d'en changer. Bien que nous trouvâmes sa remarque quelque peu futile, nous décidâmes de lui faire plaisir et entamâmes une course contre la montre pour changer de look. Après avoir rapidement renoncé à emprunter des habits aux princes et constaté que nous étions dépourvus de monnaie sonnante et trébuchante, Marcus et Allistair se ruèrent vers les écuries du château et chevauchèrent à bride abattue vers Arden.
Arrivés en un lieu où les Ombres pouvaient être manipulées, Marcus se procura des habits qui convenaient aux désirs que nous avions préalablement exprimés et qui, nous l'espérions, auraient l'heur de plaire à Flora. Marcus se vêtit à la mode début de siècle avec canotier, affubla Derek d'un costume à grands carreaux et me procura un pantalon et une chemise noires, une veste rouge un peu trop large et une canne. Le seul qui se distingua encore par son originalité fut Allistair qui demanda à Marcus une tenue typique des clans écossais. Au travers de l'Atout d'Ambre, il revinrent juste à temps au château pour le déjeuner. A la suite des présentations d'usage, Vialle nous proposa de passer à table et Flora en profita pour installer Allistair à coté de la reine, estimant, qu'étant aveugle, elle ne s'offusquerait pas de son accoutrement. Au cours du repas, les conversations se limitèrent à une prise de connaissance mutuelle et à des lieux communs. J'en profitai pour questionner Flora sur Vinta Bayle et j'appris, ainsi, qu'elle était la fille du principal négociant en vins d'Ambre et la maîtresse de Caine. Une fois la table desservie, nous narrâmes nos récentes aventures et exposâmes nos suppositions. Vialle exprima alors les plus grandes craintes quant à la défense d'Ambre dans la mesure où, Bleys s'étant éclipsé en Ombre, seul restait Julian qui, bien qu'il fut un excellent gardien en Arden, n'avait pas l'expérience militaire d'un Bénédict, d'un Eric ou d'un Bleys. Elle nous fit également part de son inquiétude quant au destin de Random et de ses compagnons et nous demanda, si nous n'avions rien d'autre à faire, d'essayer de retrouver leur piste en Ombre.
Alors que nous revenions dans nos appartements, nous rencontrâmes Imra Bayle qui nous déclara qu'il devait instamment retourner dans le reflet et contacter le Dworkin local. Il refusa de nous donner de plus amples informations mais nous promit de tout nous raconter à son retour. Finalement, Marcus accepta et contacta Eric. Imra le rejoignit dans sa chambre et s'éclipsa rapidement par la fenêtre. Nous proposâmes, à nouveau, à Eric de nous rejoindre. Celui-ci hésita tout d'abord puis, après avoir laissé un message de politesse à Finndo, prit la main de Marcus. Se souvenant de son échec initial, Marcus décida de procéder, pour une fois, avec douceur. Cette tentative, si elle ne fut pas plus couronnée de succès que la précédente, nous permit de nous rendre compte de la cause de l'échec. Lorsqu'Eric tenta de passer, un double fantomatique jaillit de son corps et le tira en arrière. Après une heure de repos, Marcus rappela Eric pour l'informer de la situation et lui faire savoir que nous ferions, plus tard, une autre tentative.
Etant épuisé, Marcus décida de remettre au lendemain le jeu de piste dans les Ombres. Après un copieux petit-déjeuner, Marcus, Derek et Allistair partirent sur les traces de Random. Quant à moi, muni de l'Atout de Marcus, j'avais pour mission de les contacter toutes les six heures. Après divers tâtonnements, Marcus suivit une piste qui les conduisit jusqu'à une vaste clairière dont le centre disparaissait dans une sorte de trou noir qui semblait aspirer toute substance. Au dessus de ce gouffre trônait le spectre de Deïrdre. Mes amis contactèrent alors Fiona qui les félicita de leur découverte, leur confirma que ce qu'ils voyaient n'étaient bien qu'une illusion et les invita à la recontacter si d'aventure ils faisaient une nouvelle découverte.
Après que Fiona eut rompu le contact, Marcus entra prudemment dans la clairière et fut immédiatement agressé par un golem qui était jusqu'alors tapi dans l'ombre des arbres. Alors que Marcus faisait retraite, Derek et Allistair virent surgir derrière eux un autre de ces maudits golems. La situation devenait critique d'autant plus que le glaive de Marcus s'était brisé sur la carapace de son agresseur. Pendant que Marcus occupait son adversaire du mieux qu'il le pouvait, Derek s'efforça d'échapper à l'autre golem tout en tentant de contacter Julian. Pendant ce temps, Allistair entreprit de se transformer en dragon et, bien qu'il fut complètement épuisé à l'issu de cette mutation, cracha un jet de flamme dans les mollets du golem de Marcus. Nous avions maintenant avec nous un splendide dragon vert qui, hélas, ne mesurait pas plus d'un mètre quatre-vingt et qui comprenait pas comment, avec des ailes aussi ridicules, les dragons pouvaient voler. Fort heureusement pour eux, Julian ne refusa pas le contact et, après de brèves explications, les rejoignit en compagnie de son cheval Morgenstern.
A la suite de deux passes d'armes extrêmement rapides, Julian trancha une jambe à chaque golem et tous s'écartèrent hors de leur portée. Deux minutes plus tard, ils virent arriver un homme que tous reconnurent comme Corwin. Avec une légère suspicion, Julian lui dit "Je croyais que tu étais mort". Tout en se dirigeant vers eux, Corwin lui répondit "Tu vois, je marche toujours dans les Ombres". A peine eut-il finit sa phrase qu'il dégaina Grayswandir et commença à s'environner de flammes. Ils s'aperçurent alors qu'une vingtaine de golems venaient de sortir du trou de la clairière et convergeaient dans leur direction. Pris de panique, mes amis s'enfuirent à travers bois, laissant Julian et Morgenstern face à Corwin et aux golems qui n'allaient pas manquer d'arriver. Après deux cents mètres de course, se rendant compte qu'ils n'étaient pas suivis, ils s'arrêtèrent et tentèrent de contacter Julian pour l'amener auprès d'eux. Hélas point de contact. Ils tentèrent ensuite d'appeler, avec le même insuccès, les autres princes et princesses d'Ambre. Les Atouts ne passaient pas.
N'entendant pas de bruit de combat, Marcus entreprit de retourner prudemment sur ses pas et constata que nos agresseurs avaient disparus, Julian et Morgenstern avec eux. Mes amis voulurent alors utiliser l'Atout d'Ambre et se rendirent compte qu'il devait maintenant être intégré aux écailles d'Allistair. Marcus récupéra alors les chevaux, chargea Allistair sur l'un d'eux et commença à rebrousser chemin vers une Ombre où les Atouts seraient à nouveau opérationnels. Au bout d'une quinzaine de minutes, il réussit enfin à contacter Fiona qui les rejoignit. Au vu de leurs explications, Fiona déclara qu'ils étaient tombé sur un piège tendu dans les Ombres et commença à se plonger dans la contemplation d'un petit miroir qu'elle avait pris dans son laboratoire. Après une demi-heure de concentration, elle dit à mes amis de s'apprêter à galoper dans les Ombres vers Ambre et lança, vers l'Ombre de la clairière, le dit miroir qui se brisa en de multiples morceaux qui semblèrent se propager à l'infini.
Fiona les guida rapidement vers Ambre et ils émergèrent d'une grotte aux pieds du Kolvir. Chemin faisant, elle leur avait expliqué qu'elle avait utilisé la Marelle pour détruire le piège et que maintenant la voie était libre. Ce petit tour de magie consistait tout naturellement à détruire l'Ombre de la clairière et celles qui l'environnaient. A coté d'elle les inventeurs de la bombe atomique n'étaient que des collégiens. Une fois dans nos appartements, nous installâmes Allistair dans un lit, entouré de nombreux seaux d'eaux. Nous ne savions pas si les dragons pouvaient ronfler. Ensuite, nous tentâmes, par acquis de conscience, de joindre Julian et nous rendimes compte, au contact de son Atout maintenant tiède, qu'il était passé à l'ennemi. Nous informâmes Vialle de ce nouvel événement et comprimes que les troupes en Arden n'auraient que peu d'efficacité sans seigneur d'Ambre pour les conduire. Sans chef, en effet, les troupes d'Arden pouvaient difficilement surveiller l'avance et les préparatifs de nos ennemis dans les Ombres adjacentes. Le seul recours restait Eric.
Alors que nous nous préparions à effectuer une nouvelle tentative, nous reçumes un étrange contact. Après quelques hésitations non l'acceptâmes, et vîmes Eric en compagnie d'Imra et de Dworkin, au centre de la Marelle primordiale du reflet. Celui-ci nous informa que Finndo était devenu fou furieux, qu'ils cherchaient tous trois à nous rejoindre mais que lui n'avait pu que nous contacter dans la mesure où même la Marelle n'avait pas pu ou voulu le faire passer. Nous entendîmes alors un gargouillis d'agonie et découvrîmes qu'Imra Bayle venait d'égorger Dworkin et répandait son sang sur la Marelle. Marcus lança alors une dague qui s'enfonça jusqu'à la garde dans le dos d'Imra pendant qu'Eric, ayant dégainé son sabre, se jetait sur l'assassin. Nous eûmes alors un instant de surprise en constatant que, non seulement Imra ne semblait pas se ressentir de la dague qui émergeait d'entre ses omoplates mais qu'en plus un spectre tirait Eric en arrière pour l'empêcher d'attaquer, à la suite d'un mot prononcé par Imra. Alors que la Marelle se désagrégeait sous l'effet du sang de Dworkin et que, subséquemment, la réalité environnante disparaissait, Marcus prit le spectre par surprise et, saisissant Eric dans ses bras, réussit à le ramener à nous. La dernière vision que nous eûmes du reflet, avant que la Marelle de Marcus ne disparaisse, fut celle d'un Imra, au sourire triomphant, duquel la dague avait émergé comme par magie.

Chapitre 8: Une mère très indulgente
Eric n'eut pas vraiment le loisir de se réjouir de son retour. Dès que nous l'eûmes informé de la situation désastreuse de la défense d'Ambre, il décida de se rendre immédiatement en Arden avec le corps expéditionnaire pour garder le dernier rempart face aux êtres ignés et à leurs troupes. Avant de partir, il rencontra brièvement Vialle qui le reçu très chaleureusement, bienque les rapports entre Eric et Random aient jadis été particulièrement tendus et que ce retour laissait présager des lendemains houleux. Cette supposition fut d'ailleurs confirmée par la dernière phrase qu'Eric émit en prenant congé de la reine, "Nous reparlerons du trône lorsque les problèmes seront règlés". Décidément, le gouvernement d'Ambre constituait l'idée directrice de tous les princes.
Eric parti, nous étions à nouveau confrontés à nos hésitations. Quelle piste suivre. Nous tentâmes, tout d'abord, de rencontrer Vinta Bayle, mère présumée de notre très cher ami Imra. Nous nous rendîmes en ville à ses entrepots et, bien que son contremaitre nous reçu très mal lorsqu'il appris qui nous étions, nous réussimes à apprendre que Vinta Bayle demeurait dans sa propriété familiale sise à plusieurs lieux d'Ambre. N'étant pas prêt à affrêter un bateau ou à y aller à cheval et remîmes l'entrevue à plus tard et revînmes au chateau.
Alors que nous étions dans nos appartements, nous entendîmes des bruits étranges. Dans le couloir nous rencontrâmes des gardes d'Ambre qui nous informèrent que deux personnes venaient d'être assassinées dans les souterrains du château et qu'ils enquêtaient. Nous descendîmes rapidement le long escalier qui mène aux soubassements de la forteresse. Après avoir constaté que personne ne semblait être rentré dans la salle de la Marelle, nous décidâmes alors d'explorer les dits souterrains, ce qui eut l'heur d'inquiéter les gardes. Après nous être munis d'une lanterne, nous commençâmes notre exploration. Après deux heures de recherche, alors que nous étions dans un long corridor, nous entendîmes un bruit derrière nous. Nous nous retournâmes et vîmes un être à l'apparence trollesque, portant un pic de mineur sur l'épaule. Il nous déclara que ce couloir était interdit et nous invita à rebrousser chemin, ce que nous fimes, considérant que la réputation des souterrains du château n'était pas vraiment usurpée.
Par la suite, nous nous enfonçâmes dans un corridor, apparemment sans fin, et supposâmes que nous devions marcher dans les Ombres. Au bout de deux heures de marche, me sentant vraiment las et ma blessure me tiraillant quelque peu, je laissai mes amis continuer l'exploration et utilisai l'Atout d'Ambre pour rentrer. Quatre heures plus tard, leur obstination fut récompensée. Ils atteignirent un escalier qui remontait. Hélas, il leur fut, tout d'abord, impossible de l'emprunter en raison de la chaleur épouvantable qui émanait de son sommet. Se rendant compte que la fournaise diminuait progressivement, ils prirent leur mal en patience et, au bout d'une heure, débouchèrent à l'air libre. Ils contemplèrent alors un paysage complètement désolé fait exclusivement de rochers étranges, certains dans une obscurité totale, d'autres dans une lumière brûlante. Seul élément notable, une tour qui semblait toujours rester dans la prénombre.
En prenant bien soin de toujours rester dans le chemin de prénombre, ils se rendirent à la tour et frappèrent à la porte. Celle-ci s'ouvrit devant un être, apparemment humain, vêtu de noir et de blanc qui les laissa entrer, sans poser la moindre question, et qui s'éclipsa. Mes amis entreprirent alors de grimper le long escalier qui conduisait au sommet de la tour et constatèrent que certaines des pièces étaient occupées par des êtres apathiques semblables au portier. Après quelques essais infructueux pour tenter de comprendre leur nature, les faire réagir ou parler, ils atteignirent le sommet de la tour. Celui-ci était occupé par un mausolée, suspendu par des élingues et revevant la lumière et l'obscurité focalisées par deux lentilles. Ayant réussi à escalader le mausolée ils firent divers essais avec les lentilles et constatèrent que d'une émanait un froid mortel et de l'autre une chaleur qui l'était tout autant. Le mausolée quand à lui était en pierre et représentait Obéron. Ne sachant plus que faire, ils utilisèrent l'Atout d'Ambre et me rejoignirent.
Nous étions revenus à notre point de départ, sans information sur le mystérieux assassin des souterrains et avec de nouvelles questions, toujours sans réponse. Me laissant me reposer au château, mes amis décidèrent de tenter de retrouver Caine dans les Ombres. Alors qu'ils erraient en Arden sans le moindre début de piste, ils aperçurent la Licorne et la suivirent comme Elle semblait le désirer. Au bout de quelques minutes, ils débouchèrent dans une clairière où Deïrdre et Bénédict s'affrontaient. Les techniques des deux combattants s'avéraient totalement différentes, armure de plaques noire, bouclier et hache à double tranchant du coté de Deïrdre et uniquement épée longue pour Bénédict. Bienqu'elle fut loin d'être ridicule face à Bénédict, il était évident qu'elle était surclassée et qu'elle ne devait qu'à son armure de ne pas encore avoir été pourfendue. Alors que mes trois compères restaient dans l'expectative, Deïrdre s'enflamma, ce qui lui procura une amélioration sensible de ses capacités. Quelques instants après, Bénédict fit de même et, continuant son implacable offensive, blessa Deidre au flanc. Pendant qu'Allistair interrogeait la Licorne du regard, Marcus et Derek décidèrent d'aider Deïrdre en cherchant à distraire Bénédict, sans trop risquer de s'exposer à ses coups mortels. Leur intervention donna un peu de répit à Deïrdre qui en profita pour disparaître au travers d'un trou d'Ombre qui venait d'apparaitre à la lisière de la forêt. N'ayant nullement l'intention d'affronter un Bénédict frustré, mes amis fuirent au travers de l'Atout d'Ambre qu'Allistair avait prudemment activé au cours du combat.
Après une légère collation agrémentée de moult spéculations sur ce qui venait de se passer, nous repartîmes, au complet cette fois, sur la piste de Caine. De retour en Arden, nous nous rendîmes rapidement compte qu'un cavalier tentait de nous rattraper. Ayant depuis peu acquis une bonne dose de méfiance, nous décidâmes de tendre une embuscade à l'inconnu et nous postâmes juste à la sortie d'un tournant. Cette attitude s'avéra très judicieuse car le cavalier qui déboucha devant nous était Finndo. Pris par surprise, ce dernier n'eut pas le temps de s'arrêter et se coucha sur l'encolure de son cheval pour passer entre nous. Au passage, Marcus se jeta sur lui et, mettant ses jambes entre les antérieurs de la monture, fit chuter l'équipage. Alors que Derek et moi-même approchions du lieu du crash, Finndo se releva en saisissant son épée, ce qui nous permis de constater que sa bague était noire. Toute négociation avec ce fou furieux nous apparu vouée à l'échec, ce que Finndo confirma rapidement en déclarant qu'il allait nous exécuter scéance tenante. Nous eûmes beau dire que ce qui était arrivé au reflet d'Ambre était du fait d'Imra Bayle, il ne nous cru pas et s'élança dans les bois à la poursuite de Marcus. Alors que je me précipitai sur le chemin pour tenter de prendre Marcus en croupe au passage, ce dernier vit une forme sombre apparaître devant lui. Comme à son habitude, il se jeta tête baissée sur le nouvel arrivant et fut fort surpris de constater que sa prise fut habilement surpassée. En fait, l'arrivant était une arrivante, Deïrdre, qui engagea le combat avec Finndo. Nous en profitâmes pour nous eclipser et rejoignîmes Allistair qui nous dit que Deïrdre lui avait au passage remis un Atout d'un lieu inconnu. Après une brève hésitation, nous l'utilisâmes.
Nous arrivâmes sur une hauteur depuis laquelle nous pûmes contempler un paysage légèrement cauchemardesque. Cet endroit était partagé en quatre secteurs distincts, dominé chacun par des éléments déchaînés, l'eau, l'air, la terre et le feu. Au confluent de ces forces se dressait une forteresse qui nous sembla inhabitée. Nous descendîmes de notre promontoire et approchâmes du chateau. Ses portes massives étaient fermées et les coups que nous leur donnâmes ainsi que nos appels restèrent sans réponse. Nous entreprîmes alors de bâtir une pyramide humaine, avec Marcus comme pilier, qui devait permettre à Allistair d'atteindre le sommet. Alors que ce dernier venait de monter sur les épaules de Derek et que sa tête atteignait les crénaux, il vit des formes humaines commencer à se matérialiser. Pour éviter d'être transpercé par une lance, il dût se jeter dans le vide. A la suite de cet événement, totalement imprévisible, nous nous ruâmes vers un chaos de rochers pour nous protéger des flèches que certains individus mal intentionnés nous adressaient avec une certaine virulence. Une fois à l'abri, nous attendîmes la fin de l'orage pour sortir un oeil et nous apercevoir que les défenseurs fantômes, utilisant des armes bien réelles, avaient disparu. Nous partîmes alors dans les Ombres et revînmes en Ambre.
Manquant vraiment d'information, nous décidâmes de partir à la recherche de Cymnéa plutôt qu'à celle de Random. Nous trouvâmes rapidement une piste et, après quelques heures de route, nous pénétrâmes dans une grotte et vîmes une lourde porte, marquée du signe de la Licorne. Alors que nous approchions, un reflet de Dworkin apparu, nous interdisant de continuer plus avant. Après quelques essais infructueux pour forcer le passage, nous appelâmes Cymnéa en désespoir de cause. Au bout de quelques minutes, la porte s'ouvrit et elle nous invita à entrer. Elle nous expliqua qu'elle avait été emprisonnée ici pendant de nombreux siècles et qu'elle avait depuis peu trouvé le moyen de sortir. Elle revenait ici régulièrement parce que c'était l'endroit où Dworkin ne penserait pas la chercher. Après avoir remis en place les défenses, elle nous rejoignit dans le salon. Ses premières paroles eurent sur nous l'effet de la foudre "Alors vous ètes près pour notre vengeance".
Prenant notre silence pour un acquiescement ou, du moins, une invitation à poursuivre, elle déversa son ire sur les seigneurs d'Ambre et entreprit de nous apporter quelques explications. Non comptant de l'avoir répudiée, Obéron l'avait fait emprisonner en ce lieu par Dworkin. Lorsqu'elle eut réussi à se libérer, elle mit à exécution le plan de vengeance auquel elle avait largement eut le loisir de réfléchir. Son but était extrêmement simple, monter sur le trône qui lui revenait de droit, ce qui ferait de nous des princes héritiers, et se venger des enfants d'Obéron. Encore une fois, nous avions le sentiment de n'être que des pions. Lorsque nous lui demandâmes l'identité de nos pères respectifs, elle refusa de nous répondre et affirma que celà n'avait aucune importance et qu'ils n'avaient été que des outils au service de ses buts. En Ambre, tout semblait tourner autour du trône et du jeu à la mode, celui de la manipulation. Nous apprîmes ainsi que Finndo avait ramené Eric à la vie, très certainement pour usage ultérieur. Nous n'avions aucune envie de devenir princes héritiers, d'autant plus que ce titre semblait être synonyme de cible, mais préférâmes prudemment abonder dans son sens.
J'entrepris alors de lui parler des problèmes actuels d'Ambre et des multiples ennemis, connus ou inconnus, qui la menaçaient. Nous convînmes rapidement que les êtres ignés constituaient le danger principal et qu'il était impératif de les identifier et de comprendre leur nature. Après que nous lui eûmes confié notre impuissance face à ces redoutables adversaires et aux golems, elle nous dit qu'elle nous verrait individuellement pour voir de quoi nous étions capables mais qu'auparavant elle allait nous quérir des armes et des armures adéquates dans les Ombres. Avant des partir faire "ses courses", selon l'expression de Marcus, elle nous recommenda d'éviter de les arborer devant les autres seigneurs d'Ambre qui ne pourraient que s'interroger sur leur provenance. En attendant son retour, nous avions tout le loisir de méditer sur ce que nous venions d'apprendre.

Chapitre 9: Le traître se venge II, le retour
Après que notre charmante mère se soit retirée dans ses appartements, nous entreprenons d'explorer le domaine dans lequel elle avait été confinée pendant quelques millénaires. Nous commençons ainsi à errer dans les couloirs, creusés à même le roc, et constatons que ce lieu avait jadis dû être la demeure d'un peuple troglodyte, maintenant disparu. Nous nous rendons également compte, avec un plaisir non dissimulé, qu'il y est tout à fait possible de manipuler les Ombres. Dworkin avait, semble-t-il, protégé ce lieu contre le pouvoir du Logrus mais pas contre celui de la Marelle. Après quelques heures d'exploration, la fatigue nous ayant rejoint, nous retournons dans la salle principale, allumons un feu dans la vaste cheminée et nous endormons tant bien que mal, qui à même le sol, qui dans des fauteuils ayant dû connaître, il y a très longtemps, des jours meilleurs.
Le lendemain matin nous sommes réveillés par une agréable odeur de café et de croissants. Notre mère a apparemment terminé les courses, promises la veille au soir, chez Harry's coffees and Tobaccoes. Qu'elle ait désiré nous apparaître sous un jour plus amène ou qu'elle ait adopté les habitudes culinaires de l'Ombre Terre, l'intention est louable et surtout bienvenue. Nous en profitons pour parler de choses plus anodines et surtout moins polémiques que la conquête du trône d'Ambre ou qu'une hypothétique vengeance, à l'exception de Marcus qui, boudant ostensiblement, n'émet comme sons que ceux de la déglutition. Entre autres sujets, Allistair oriente la conversation vers les pouvoirs de transformation liés au Logrus. Nous apprenons ainsi que ces capacités sont liées au sang du Chaos et que tout ceux qui en possédent pouvent, avec plus ou moins de réussite, s'y essayer. Elle ajoute que tous les descendants d'Obéron ont cette compétence mais n'en font apparemment pas usage, soit qu'il ne le savent pas, soit que leur lien avec la Marelle y fait obstacle.
Le petit-déjeuner avalé, Cymnéa nous remet les armes qu'elle a été quérir dans les Ombres, une dague pour Allistair et Derek, un glaive pour Marcus, une rapière et une dague pour moi-même. Ces armes ainsi que leurs fourreaux sont splendides mais également signés pour quiconque se rappelant que le bleu et l'argent sont les couleurs de Cymnéa. Elle nous propose ensuite des entretiens particuliers aux fins de mieux nous connaître et de progresser dans les talents exotiques que nous pouvons posséder. Allistair se propose immédiatement de l'entretenir sur la magie. Trois heures plus tard, il revient, un sourire sur les lèvres, serrant contre sa poitrine un volumineux grimoire, et clame "au suivant". Derek est celui-là. Quand il nous rejoint dans la grande salle après son entretien, il murmure qu'il doit maintenant développer une nouvelle technique d'utilisation des Atouts. Je lui succéde auprès de notre mère et lui expose mes interrogations quant à mes curieux jurons qui semblent soit améliorer mes capacités, soit avoir une action sur la réalité du monde. Elle me précise qu'ils correspondent à une utilisation de la magie à l'état brut, dénommée "mots de pouvoir", et que le seul conseil qu'elle peut me donner est de les expérimenter. Alors que je prend congé, elle me suggére d'éviter, pour le moment, d'étudier le grimoire d'Allistair car je ne suis pas encore prêt et que le seul résultat que je pourrais obtenir ce serait des maux de tête. Comme l'on pouvait s'y attendre, Marcus reste dans son fauteuil et déclare qu'il n'a rien à lui demander et ne veut rien lui devoir. Qui préfére-t-il, Fiona ou Cymnéa ? Le concours est lancé.
Après avoir convenu que le plus important, à l'heure actuelle, est de comprendre les motivations et les moyens des assaillants d'Ambre, nous prenons congé de notre mère et décidons de quitter l'ombre de Sphehal et de suivre la piste de Gérard dans les Ombres. Autour de nous s'étend une terre désolée, un paysage lunaire semblable aux Barren d'Irlande où furent exilés les opposants au régime anglais. Toutes nos tentatives de manipuler les ombres pour retrouver Gérard s'évérent vaines. Nous décidons alors de changer Gérard par Random, ce qui s'avère judicieux dans la mesure où nous réussissons à quitter les ombres stériles. Après quelques errances et changements d'ombres nous chevauchons dans une forêt de broussailles lorsque nous sommes pris dans une embuscade tendue par des hommes lézards. Le bref combat qui s'en suit est suffisant pour couper définitivement l'apétit à la moitié de nos assaillants et pour décider le reste à observer une période de jeûne salutaire.
Nous continuons notre chemin et, quelques ombres plus tard, nous repérons Random à la tête d'une armée de chevaliers en armures de glace attaquant des hommes en armures de cuir. Depuis notre point d'observation, nous nous rendons compte que les assaillis sont les forestiers d'Arden et qu'ils sont en bien mauvaise posture contre la troupe commandée par Random, plus nombreuse, mieux armée et mieux armurée. C'est le moment que choisi Derek pour une tentative de contact de Random via son atout toujours chaud. Alors qu'il est extrêmement concentré sur l'atout, une dague transperce ce dernier et nous entendons une voix féminine déclarer "vous ne devriez pas faire ce genre de chose, ce n'est pas raisonnable". Nos quatre regards se portent immédiatement dans la direction de la susdite voix et nous reconnaissons une Deïrdre mi amusée, mi agacée. Par malheur, son apparition, quelque peu musclée et soudaine, nous ayant fait repèrer, nous fuyons pendant que Deïrdre s'occupe de trois assaillants.

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